Filière bois-énergie

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Table des matières

Synthèse de cette étude

Quelques notions de physique utiles dans le domaine de l’énergie

L’énergie est la grandeur physique qui permet de caractériser un changement d’état dans un système. Cette notion est utile pour comprendre les consommations mondiales et les besoins de production.
Les Statistiques énergétiques dans lesquelles on restreint la définition de l’énergie à la chaleur ou à une force mécanique ou électrique
La Puissance afin de comprendre les valeurs affichées pour les installations de production.
Le Pouvoir Calorifique afin de connaitre l’énergie produite par unité de masse d’un combustible.

Point sur la consommation d’énergie dans le monde et en France

La consommation de bois sur un cycle long (depuis 1860) est en diminution c’est la seule énergie qui diminue avec le temps. La consommation mondiale repose à plus de 75% sur les énergies fossiles. Les nouvelles énergies renouvelables sont totalement marginales à ce jour.
Le mix énergétique français en raison de la présence de 40% de nucléaire utilise moins de 50% d’énergies fossiles. La part des EnR est de l’ordre de 11% dans laquelle le Bois intervient de façon prépondérante pour environ 40% devant l’hydraulique 20%

Filière Bois-Energie en France

La forêt française occupe 1/3 de la surface du territoire. l’ONF planifie un prélèvement annuel qui représente environ la moitié de l’accroissement naturel.
Dans les forêts feuillues les chênes représentent 1/3 du volume, ils sont réservés au bois d’œuvre. Les gros volumes de qualité moyenne ou basse sont utilisés comme bois de chauffage ou bois-énergie
Dans les petites et moyennes propriétés (moins de 25 ha) les propriétaires réalisent peu de coupes (revenus jugés insuffisants, accès difficiles, etc.) et les conditions d’exploitation doivent être améliorées.
L’objectif pour 2023 est d’augmenter de plus de 25% le niveau de 2014 en bois destiné à la consommation de chaleur.

La Centrale de Gardanne

Principe de fonctionnement d’une centrale à vapeur flamme et son rendement thermodynamique afin de comprendre le non-sens écologique et énergétique de la production électrique en biomasse.
Pour délivrer une puissance de 150 MW la centrale brule 855.000 tonnes de bois dont la moitié est importée d’Espagne et du Brésil. Les calculs montrent que la solution n’est pas respectueuse de l’environnement et qu’elle ne peut être étendue aux 3 autres centrales à charbon encore en service en métropole. Les extraits d’articles de presse montrent les aspects sociaux économiques peu clairs de vente entre groupes énergéticiens européens de cette centrale alors que sa fermeture est programmée pour 2022.

Centrales de Cogénération

La production d’énergie par la biomasse solide consiste en la production de chaleur ou de cogénération chaleur / électricité à partir de bois (bois-énergie).
Sur les centrales de cogénération, les 3/4 de l’énergie est sous forme thermique et 1/4 sous forme d’énergie électrique.
La Commission de Régulation de l’Energie (CRE) a lancé des appels d’offres depuis 2003 ce qui a conduit à la réalisation d’une cinquantaine de centrales de quelques MW à quelques dizaines de MW.
En Provence Pierrelatte 12 MW, Tarascon 12 MW, Brignoles 22 MW



A propos de l’énergie

Définition de l’énergie

L’énergie est la grandeur physique qui permet de caractériser un changement d’état dans un système :
Modification de température
Modification de la vitesse
Modification de forme
Modification de la composition chimique
Modification de la position dans un champ (magnétique, électrique, gravitationnel…)
Changement de composition atomique
Modification de l’énergie ou du nombre de photons
L’énergie n’est donc rien d’autre que l’unité de compte de la transformation du monde qui nous entoure

Le mot vient du grec et signifie « force en action » c’est-à-dire capacité à produire un mouvement.
L’énergie n’est pas une substance matérielle : c’est une grandeur physique qui caractérise l’état d’un système ; elle peut être stockée et existe sous de nombreuses formes.

Premier principe de la thermodynamique ou Loi de conservation de l’énergie : Au cours d’une transformation l’énergie n’est ni créée ni détruite, elle peut être convertie d’une forme en une autre (travail, chaleur) mais la quantité totale d’énergie reste invariable.
L’énergie ne peut être ni créée, ni détruite, elle peut juste être transférée ou convertie en une autre énergie.

Statistiques énergétiques

Dans le domaine des statistiques énergétiques, on restreint la définition de l’énergie à la chaleur ou à une force mécanique ou électrique. Ce sont les formes d’énergies utilisées par le consommateur final.

Energie Primaire – Energie Finale

Energie Primaire

L’énergie primaire est l’énergie disponible dans l’environnement et directement exploitable sans transformation. Étant donné les pertes d’énergie à chaque étape de transformation, stockage et transport, la quantité d’énergie primaire est toujours supérieure à l’énergie finale disponible.
Les sources d’énergie primaire sont multiples :

  • Le pétrole brut ;
  • Le gaz naturel ;
  • Les combustibles solides (charbon, biomasse) ;
  • Le rayonnement solaire ;
  • L’énergie hydraulique ;
  • L’énergie géothermique ;
  • L’énergie tirée des combustibles nucléaires.

Il s’agit donc essentiellement d’énergie thermique et d’énergie mécanique.
Ainsi, l’énergie mécanique produite par un moulin à vent est une énergie primaire.

Energie secondaire

L’énergie secondaire est obtenue par transformation, contrairement à l’énergie primaire, qui désigne une énergie disponible dans l’environnement et sans transformation.
Cette énergie est souvent plus facile à stocker, transporter et utiliser que les sources d’énergie primaire.
C’est pour cette raison que les formes d’énergie secondaire sont appelée « vecteurs énergétiques ». C’est le cas notamment de l’électricité, des carburants pétroliers raffinés (essence, gasoil) ou encore, à l’avenir, de l’hydrogène.

Energie Finale

L’énergie finale désigne l’ensemble des énergies prêtes à l’emploi, délivrées au consommateur (l’essence disponible à la pompe, etc.).

Energie

Unités d’énergie

Dans le système international (SI) l’énergie s’exprime en Joules.
Le Joule est une quantité trop faible pour exprimer l’énergie produite ou consommée à l’échelle des installations électriques, on lui préfère le kilowattheure (kWh) et ses multiples.
Inversement, à l’échelle de la physique des particules, le Joule est une unité trop grande pour exprimer l’énergie acquise par un électron soumis à un potentiel électrique de 1 Volt. On utilise dans ce domaine l’électron-volt (eV)
La tonne d’équivalent pétrole (tep) est généralement utilisée pour comparer les différentes sources d’énergie entre elles.
La calorie est une ancienne unité d’énergie hors du SI qui n’est plus utilisée qu’en diététique.

Conversions

1 eV = 1,6 10 -19 J
1 J = 1Ws
1 kWh = 3,6 10 6 J
1 tep = 11 630 kWh
1 kcal (kilocalorie) = 4184 J

Energie pour un humain

Avec la force de ses jambes :
Un homme de 80 kg portant une charge de 10 kg sur un dénivelé de 2000 m produit
0,5 kWh (E = mgh)
S’il réalise cette tâche 1 jour sur 2 pendant 1 an il aura produit 100 kWh / an

Avec la force de ses bras
Un homme qui déplace en hauteur de 1m un volume de 6 m3 de terre produit
0,05 kWh (10 fois moins qu’avec les jambes)
Sur une année il aura produit 10 kWh / an

L’énergie humaine est à comparer à celle fournie par 1 litre d’essence : 10 kWh 

En moyenne sur la planète chaque personne utilise 20.000 kWh / an
Pour un français c’est 60.000 kWh / an

Cette consommation est réalisée directement ou indirectement en tirant profit de la production des machines que l’homme a développées.
Si l’on compare l’énergie qu’un homme peut produire (100 kWh / an)  à celle qu’il utilise (20.000 kWh / an), on peut dire qu’en moyenne sur Terre chaque homme dispose de 200 esclaves mécaniques
Cela a amené beaucoup d’anthropologues et de sociologues à écrire que ce n’est pas la bonté de l’homme qui a aboli l’esclavage mais la machine à vapeur.
Les dates coïncident en tout cas !

Relation Energie et Puissance

L’énergie est le travail qu’une source est susceptible d’effectuer.
La puissance est le taux de transfert de cette énergie.

On peut symboliser ça comme un réservoir dont l’énergie quantifierait le contenu et la puissance serait le débit maximal de remplissage/vidange du réservoir.

La puissance P d’une machine est l’énergie E qu’elle fournit pendant une unité de temps.

Puissance

Unités de puissance

Watt (W)
La puissance exprime le transfert d’énergie par unité de temps.
Son unité est le Watt dans le Système International (SI)
Un Watt est égal au transfert d’un Joule en une seconde

Cheval vapeur (hp de l’anglais Horse Power)
Cette unité historique n’est pas dans le standard du SI
1 cheval vapeur = 75 x 9.81 = 735.75 watts soit 0,736 kW

Puissance humaine

Un homme, sur un coup de rein (c’est à dire en soulevant un sac de sable), peut développer une puissance de 1 cheval.
Pendant un effort continu, un homme peut développer entre 75 et 100 Watts soit environ
0,1 cheval

Si l’on compte pour un homme 100 W avec les jambes et 10 W avec les bras, on peut comparer  cette puissance à celle des machines :
1 tracteur de 60 kW = 600 paires de jambes
1 avion de 100 MW = 1 000 000 paires de jambes

Pouvoir Calorifique

Le pouvoir calorique inférieur (PCI) est la quantité théorique d’énergie contenue dans un combustible. Le PCI désigne la quantité de chaleur dégagée par la combustion d’une unité de masse de produit dans des conditions standardisées, on l’exprime en kWh/kg.
Plus le PCI est élevé, plus le produit fournit de l’énergie.

Energies fossiles

Type de combustible PCI kWh / kg
Charbon cendreux 2.80 – 3.00
Anthracite 6.90 – 7.70
Fioul domestique 11.86
Gaz Propane / Butane 12.78 / 12.66

Energie du Bois

Type de combustible Taux d’humidité PCI kWh / kg
Plaquettes forestières / coupe fraîche 55 % 2.00
Plaquettes forestières / Stockage 40 % 2.89
Ecorces  de sapin   50 % 2.14
Plaquettes menuiserie   20% 4.22
Granulés bois / Briquettes bois 6 % 4.90

Si pour les énergies fossiles fioul ou gaz, le PCI reste relativement constant, il n’en est pas de même pour le bois de chauffage dont le PCI dépend de son taux d’humidité.

Le PCI est inversement proportionnel au taux d’humidité, par exemple 2 m3 de bois de chauffage sec produiront la même énergie que 3 m3 de bois plus humide ayant séché à l’air de 12 à 18 mois. Le bois de chauffage contenant 20 % d’humidité produit 30 % d’énergie de plus qu’un bois contenant 35 % d’humidité.
Notons que l’essence des arbres n’a pas une importance capitale sur le pouvoir calorifique, car l’écart maximal entre toutes les essences n’est que de 10 %.

Consommation d’énergie

Consommation d’énergie mondiale

Source cours Mines Paritech 2019 de JM Jancovici

Si l’on regarde l’évolution « long terme » de la consommation d’énergie par personne on remarque que les énergies s’ajoutent les unes aux autres au fil de leur mise en œuvre.
Autrement dit la découverte d’une nouvelle énergie ne remplace pas une énergie plus ancienne elle s’y ajoute.
Parmi toutes les énergies mise en œuvre, seule la part du bois décroit avec le temps. Ceci s’explique par un déboisement des terres qui deviennent agricoles quand la mécanisation de l’agriculture apparait
Au plan mondial les énergies carbonées sont largement majoritaires Charbon, Pétrole et Gaz représentent les 3/4 de la consommation

Bilan énergétique France 2018

Source Ministère de la transition écologique et solidaire
Commissariat général au développement durable
Chiffres clés de l’énergie Edition 2019 (septembre)

Le diagramme de Sankey, représenté ci-dessus et communément utilisé pour représenter des bilans énergétiques, retrace l’ensemble des flux (approvisionnement, transformation, consommation, y compris pertes) sous forme de flèches de largeur proportionnelle à la quantité d’énergie.
P : production nationale d’énergie primaire; DS: déstockage; I : solde importateur

1 – Pour obtenir la consommation primaire, il faut déduire des ressources primaires le solde extérieur d’électricité ainsi que les soutes maritimes et aériennes internationales.
2 – Y compris énergies marines, hors accumulation par pompage.
3 – Energies renouvelables thermiques (bois déchets de bois, solaire thermique, biocarburants, pompes à chaleur, etc.).
4 – Injection de biométhane (compté comme énergie renouvelable dans les ressources primaires) dans les réseaux de gaz naturel.
5 – L’importance des pertes dans le domaine de l’électricité tient au fait que la production nucléaire est comptabilisée pour la chaleur produite par la réaction, chaleur dont les 2/3 sont perdus lors de la conversion en énergie électrique.
6 – Usages non énergétiques inclus. Pour le charbon, les produits pétroliers raffinés et le gaz naturel, la décomposition de la consommation finale en usages énergétiques est indiquée entre parenthèses.

Champ : France entière (y compris DOM).
Source : calculs SDES, d’après les sources par énergie.

Consommation d’énergie primaire par type d’énergie en France

Répartition de la quantité d’énergie primaire par type d’énergie en France

La consommation primaire de la France s’élève à 249 Mtep en 2018 (en données non corrigées des variations climatiques). Le bouquet énergétique primaire réel de la France se compose de 41% de nucléaire, 29% de pétrole, 15% de gaz naturel, 11% d’énergies renouvelables et déchets et 4% de charbon.

Filière bois-énergie dans les EnR

Part de Production et Ressources

Source : Office National des Forêts (ONF) 

En 2018, la production primaire d’énergies renouvelables s’élève à 27,7 Mtep. Les principales filières restent la biomasse solide (38,3 %), l’hydraulique renouvelable (20,2 %), les biocarburants (9,9 %), l’éolien (8,8 %) et les pompes à chaleur (8,7 %).

Le bois-énergie, qui représente la quasi-totalité de la biomasse solide, demeure la première source d’énergie renouvelable consommée en France, loin devant l’électricité d’origine hydraulique. Son principal usage est le chauffage.

Les forêts françaises couvrent 15,5 millions d’hectares, ce qui équivaut à près du tiers de la surface du territoire.
Le prélèvement annuel de bois, environ 50 millions de mètres cube, représente à peine plus de la moitié de l’accroissement naturel de la forêt.

Où trouver du bois supplémentaire ?

Source : ADEME

Dans les forêts feuillues : les chênes, dont la haute qualité est très recherchée, représentent 1/3 du volume sur pied. Les qualités moyennes et basses trouvent plus difficilement des débouchés. Les autres essences représentent des volumes importants souvent valorisés en bois bûche et en bois énergie.
Dans les forêts résineuses : la proportion de bois d’œuvre sur pied représente jusqu’à 70 % pour le Pin Maritime et le Douglas.
Dans les petites et moyennes propriétés (moins de 25 ha) : aujourd’hui, les propriétaires réalisent peu de coupes (revenus jugés insuffisants, accès difficiles, etc.) et les conditions d’exploitation doivent être améliorées.

Objectifs de développement du Bois-Energie

La Programmation Pluriannuelle de l’Énergie (PPE), dont les objectifs ont été précisés par décret en octobre 2016, fixe un objectif global pour la consommation de chaleur issue de la biomasse d’environ 13,5 Mtep en 2023 contre 10,7 Mtep en 2014

Le contenu énergétique du bois dépend principalement de son humidité : le Pouvoir Calorifique Inférieur (PCI) d’une tonne de bois à 20 % d’humidité est de 3900 kWh (soit 0,36 tep) et de 2200 kWh (soit 0,19 tep) à 50 % d’humidité (chiffrage en accord avec le paragraphe « Energie du Bois»)

Centrale Thermique de Gardanne

Les centrales thermiques au charbon en France

Etat des lieux

En raison du programme de fermeture des centrales thermiques à charbon, lié notamment aux exigences environnementales de la directive européenne sur les grandes installations de combustion, le nombre d’unités encore actives en métropole a été réduit à cinq en 2015.

Trois centrales thermiques au charbon subsistent par ailleurs en outre-mer, une en Guadeloupe et deux à La Réunion. Ces centrales utilisent également un combustible renouvelable issu de la canne à sucre, la bagasse, durant la campagne sucrière.

Centrale à vapeur

Source cours Ecole nationale Supérieure des Mines

Toutes les centrales de production électrique qu’elles soient à énergie nucléaire, au gaz au charbon ou au bois sont des centrales thermiques à vapeur.
En dehors des centrales nucléaires, les autres centrales sont dites centrales à vapeur flamme.
La finalité d’une centrale à vapeur est de produire de la puissance mécanique à partir d’énergie thermique.

Composants d’une centrale à vapeur

Le schéma de principe d’une centrale à vapeur comprend 4 composants : une pompe, une chaudière, une turbine, un condenseur.
La production électrique est réalisée en connectant 2 composants supplémentaires un alternateur placé en aval de la turbine qui produit le courant alternatif et un transformateur qui élève la tension pour la connexion au réseau Très Haute Tension de distribution électrique.

Schéma de principe d’une centrale à vapeur

Dans les centrales thermiques le fluide qui circule est de l’eau que l’on fait bouillir sous pression. L’eau passe de l’état liquide à l’état gaz puis revient à l’état liquide. C’est un cycle diphasé dans lequel les changements d’état font intervenir de gros transferts thermiques ce qui permet d’obtenir des puissances élevées.

Rendement d’une centrale électrique à vapeur flamme

L’optimum technico-économique des centrales électriques à vapeur à flamme correspond jusqu’à ces dernières années à des cycles de Hirn avec des conditions de sortie chaudière de l’ordre de 560 °C et 165 bars, conduisant, avec une réchauffe et sans prélèvement, à un rendement thermodynamique voisin de 40 %.

Le rendement eta du cycle de Hirn est inférieur à celui du cycle de Carnot.
Le cycle de Carnot ne peut pas s’appliquer directement aux centrales thermiques car la compression d’un mélange liquide/vapeur créerait de grands risques d’endommagement des matériels.
Le rendement du cycle de Carnot est calculé avec les températures de la source chaude TC température chaudière et la source froide TF température atmosphérique (en degrés Kelvin).
La température atmosphérique est voisine de 300 °K

eta = 1 – TF / TC

Le rendement maximal de Carnot est une conséquence du second principe, qui interdit une transformation intégrale de chaleur en travail, c’est-à-dire du désordre en ordre.

Pour une température chaudière de 830 °K (560 °C), le rendement théorique de Carnot est voisin de 65%, dans les faits, comme nous l’avons vu, le rendement effectif est de l’ordre de 40%.
Cela signifie que 60% de l’énergie d’une usine comme celle de Gardanne est rejetée dans l’atmosphère sous forme de chaleur, d’où l’intérêt de machines produisant à la fois de la Chaleur et de l’électricité. Ce sont les unités de cogénération dont on décrit plus loin le fonctionnement.

Le cycle de Hirn (ou de Rankine avec surchauffe) utilise un fluide condensable qui est refroidi à une pression et une température suffisantes pour qu’il soit entièrement liquéfié avant compression. Dans ces conditions, le travail de compression devient quasiment négligeable devant le travail de détente. Le liquide comprimé est vaporisé et surchauffé dans la chaudière par échange thermique avec la source chaude, puis détendu et condensé. L’état diphasique du fluide lors des phases de condensation et de vaporisation est très favorable pour les échanges de chaleur.
Le cycle de Hirn est une amélioration du cycle de Rankine en ajoutant un surchauffeur qui provoque une surchauffe isobare de la vapeur à la sortie du générateur de vapeur, ce qui permet de faire tourner les ailettes de la turbine avec de la vapeur sèche

Cycle de Rankine-Hirn Cycle de Carnot

Schéma d’une centrale à vapeur flamme

Schéma simplifié faisant apparaitre les 4 composants liés au cycle thermodynamique :
la pompe, la chaudière, la turbine et le condenseur.
Les 2 composants de raccordement au réseau de fourniture électrique l’alternateur et le transformateur sont également représentés

Schéma détaillé de la centrale Provence 4

La centrale est représentée avec une alimentation au charbon. Le principe reste le même avec le bois. On ajoute la complexité du système réel de chaudière avec le lit fluidisé circulant qui confère un comportement liquide au mélange avant son injection dans la chaudière. L’apport de calcaire est destiné à traiter l’oxyde d’azote et de soufre dans le processus de réduction de la pollution.

Prévisions de fonctionnement pour Gardanne

Investissement et énergie produite

L’unité biomasse est issue de la conversion de la tranche 4 de production au charbon.
L’investissement de conversion est de l’ordre de 230 millions d’euros.

D’une puissance électrique de 150 MW, Provence 4 Biomasse a pour objectif une production en base de plus de 7.500 heures par an jusqu’en 2034 (environ 310 jours / an).
La production d’énergie par an serait de 1125 GWh  (0,15 GW x 7.500 h) 

Le mix combustible de l’unité Provence 4 biomasse est composé à 90% de biomasse et à 10% de produits charbonniers.
La centrale brûle environ 855.000 tonnes de combustible biomasse par an et 127.000 tonnes de charbon cendreux

Vérification des données

Calcul de l’énergie théorique à partir du PCI des matières premières consommées

Plaquettes forestières / Stockage PCI 2.89 kWh/kg Humidité 40 %
Charbon cendreux PCI 2.8 kWh/kg

Biomasse
855.000 tonnes = 855. 106 kg
Energie Biomasse : 855. 106  x 2.89 = 2470. 106  kWh  = 2470 GWh

Charbon
127.000 tonnes = 127. 106 kg
Energie charbon : 127. 106  x 2.8 = 355. 106  kWh  = 355 GWh

Energie théorique Biomasse + Charbon
2470 + 355 =  2825 GWh
On applique un rendement de 40 %
2825 x 0.4 = 1130 GWh

Contradictions de la  production électrique avec du bois

Remarques

Le bois est une énergie particulièrement adaptée au chauffage individuel ou collectif.
Si on l’utilisait beaucoup pour l’électricité, il n’y en aurait plus assez pour le chauffage et la construction.
Il est aberrant d’utiliser du bois pour faire de l’électricité, puis d’utiliser l’électricité pour se chauffer, car on perd comme on vient de le calculer énormément en rendement.

Si l’on souhaite vraiment faire de l’électricité avec du bois, il faudrait le faire en cogénération qui est la production simultanée d’électricité et de chaleur.
Les rendements totaux sont bien meilleurs. Malheureusement, les projets de centrales au bois en France ne sont pas en cogénération certainement pour des raisons de coûts.

En France, l’électricité n’est pas vraiment un souci, du moins sur la question du réchauffement climatique, puisqu’on a le nucléaire.
Pour diminuer nos gaz à effet de serre, mieux vaut s’attaquer aux deux sources principales de CO2 : le chauffage des bâtiments et les transports.

N’oublions pas que les arbres mettent des décennies à pousser. Si on plantait beaucoup d’arbres, ça viendrait inévitablement en concurrence avec les cultures alimentaires, et ça ne suffirait même pas pour nous fournir en électricité.

Consommation de bois pour la production électrique

On a vu que pour l’Office National des Forêts (ONF), un prélèvement annuel de bois, d’environ 50 millions de mètres cube représente à peine plus de la moitié de l’accroissement naturel de la forêt.

La tranche Provence 4 de Gardanne consomme 855 000 tonnes de bois par an.
Si on estime à 500 kg le poids moyen après séchage d’un mètre cube de bois.
On obtient 1,7 millions de mètres cube   

La puissance de la tranche Provence 4 est de 150 MW en Biomasse
Cette puissance était de 250 MW quand Provence 4 était alimentée au charbon.
La puissance de la tranche Provence 5 est de 600 MW au Charbon.

Pour retrouver la puissance de 850 MW qui était celle de l’usine de Gardanne il faudrait utiliser: 6,8 millions de mètres cube soit plus de 13% du prélèvement prévu par l’ONF

pour les 4 usines de production au charbon en France qui représentent 5 tranches de 600 MW, la conversion en Biomasse nécessiterait 34 millions de mètres cube, soit 70% du prélèvement prévu par l’ONF

Pressions politiques autour du site de Gardanne

Source Observ’ER Baromètre 2017

La particularité de l’appel d’offres du Commission de Régulation de l’Energie CRE 4 d’octobre 2011 a été d’accorder une dérogation aux projets de centrales électriques à biomasse implantés en Provence-Alpes-Côte d’Azur et en Bretagne.
Deux régions déficitaires en électricité et fragiles en périodes de pics de demande. Ces projets avaient la possibilité de déroger à la règle d’un minimum de 60 % d’efficacité énergétique (part d’énergie primaire valorisée en électricité et chaleur) à condition de pouvoir justifier que « le projet contribue à améliorer la sécurité d’alimentation en électricité de la région ».

Sur les cinq projets en exploitation ou en construction, deux entrent dans ce cadre.
Le projet le plus important en taille concerne la centrale électrique à charbon d’Uniper (ex-E.ON) à Gardanne, dans les Bouches-du-Rhône, dont la tranche 4 a été convertie à la biomasse grâce à un investissement de 250 millions d’euros.
L’installation de 150 MWe devrait représenter 6 % de la production d’électricité de la région et couvrir 3 % de sa consommation.

Après des tests réalisés en 2016, la production industrielle avait commencé à monter en puissance, jusqu’à ce qu’Uniper se voit annuler son autorisation d’exploiter par le tribunal administratif de Marseille.

En cause, des plaintes déposées par les Parcs naturels régionaux (PNR) du Verdon et du Lubéron et par France Nature Environnement Paca dénonçant une étude d’impact insuffisante qui n’analysait pas « les effets négatifs indirects et permanents du projet sur les espaces forestiers de la zone d’approvisionnement » de la centrale, située dans un rayon de 400 km.
Il est vrai que le site nécessite un approvisionnement colossal, à la hauteur de la puissance qu’il développe : les volumes de bois s’élèvent à 850 000 t/an.

Selon l’énergéticien allemand, une moitié provient de la région Sud-Est mais se compose de bois de recyclage (palettes) et de déchets verts. L’autre moitié comprend de la biomasse forestière importée, conformément au plan d’approvisionnement validé par l’État. L’essentiel de ces importations provient du Brésil et d’Espagne.

Cependant, arrêter une telle centrale n’est pas chose facile. Ainsi, le préfet des Bouches-du-Rhône a autorisé en juin 2017 une poursuite de l’exploitation à titre provisoire, justifiant sa décision par le caractère indispensable du site pour l’approvisionnement en électricité de la région.

L’affaire n’est pas terminée car le ministre de la Transition écologique et solidaire, Nicolas Hulot, a ensuite fait appel le 7 juillet 2017 de la décision du tribunal administratif. Quant aux PNR du Verdon et du Luberon, ils ont dû retirer leur plainte et signer un accord avec Uniper le 29 septembre 2017, suite aux menaces de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur de stopper leurs subventions, selon le journal en ligne Reporterre.

La centrale de cogénération de Brignoles

La Cogénération

Production de chaleur et cogénération électrique

La biomasse solide

La production d’énergie par la biomasse solide consiste en la production de chaleur ou de cogénération chaleur / électricité́ à partir de bois (bois-énergie), de déchets et de produits agricoles.
La filière Bois-énergie est la 1ère source de production d’énergie renouvelable en France.
97% de la production totale d’énergie de la filière est réalisée par la biomasse solide.
Cette filière fournit 80% de la production de chaleur renouvelable.

Lancement des appels d’offre

Source CEREMA Direction territoriale méditerranée

Il n’existe à ce jour qu’une centrale biomasse en fonctionnement lauréate des appels d’offres de la Commission de Régulation de l’Energie (CRE) et ne produisant que de l’électricité́ : La centrale de Gardanne est l’unique centrale biomasse électrique.

La Commission de Régulation de l’Energie a lancé les appels d’offres CRE 1, 2, 3 et 4 qui ont permis la mise en service de 35 centrales de cogénération entre 2004 et 2015, pour une puissance totale installée de 484 MW.
10 centrales de cogénération biomasse, d’une puissance totale de 78 MW, sont soumises au régime de l’Obligation d’Achat (OA).

Les centrales de cogénération ont en moyenne une puissance électrique 10 fois plus faible que la centrale dédiée à la seule fourniture électrique de Gardanne.
La pertinence de ces centrales est la fourniture d’énergie sous forme de chaleur. Les 3/4 de l’énergie de cogénération est sous forme thermique et 1/4 sous forme d’énergie électrique. Pierrelatte 12 MW, Tarascon 12 MW, Brignoles 22 MW, pour mémoire, Gardanne 150 MW

Sites de production d’électricité à partir de la biomasse solide (2017)

Les valeurs affichées ne concernent que la puissance électrique des centrales.
Quelques exemples en région PACA
Pierrelatte : La partie chaleur sur un réseau de 18 km alimente des logements de la ville mais aussi des serres agricoles, l’élevage de grenouilles ou encore la ferme aux crocodiles.
Tarascon : L’usine de pâte à papier a été retenue par le ministère de la transition écologique et solidaire pour l’installation d’une centrale
Brignoles : Voir plus bas le focus sur cette centrale

Principe de fonctionnement

Source CIBE.fr

  1. Chaudière biomasse.
  2. Evaporateur – Génération de vapeur haute pression.
  3. Détente de la vapeur haute pression. La turbine vapeur entraine un turbo alternateur permettant de produire de l’énergie électrique.
  4. La vapeur basse pression à la sortie de la turbine alimente le processus industriel de consommateur chaleur.
  5. L’excédent de vapeur est condensé et retourné à la chaudière.

Usine de cogénération de Brignoles

Source var.gouv.fr

L’unité résulte d’un projet présenté à l’appel d’offres CRE4 de la Commission de régulation de l’énergie (CRE), lancé en 2010.
Elle a été inaugurée le 11 mars 2016 et représente un investissement de 90 millions d’euros.
(Chiffre à rapprocher des 230 millions d’euros pour la conversion de Provence 4)

L’appel d’offre spécifiait que l’efficacité énergétique globale de l’installation doit être de 70%.
(L’appel d’offre de 2016 demande un minimum de 75% d’efficacité énergétique)

Combustible biomasse : 180 000 tonnes de bois
140 000 tonnes seront prélevées sur la forêt provençale dans un rayon d’une centaine de kilomètres, pendant trois ans minimum
40 000 tonnes proviendront de déchets de bois naturel

Valorisation chaleur
Puissance thermique : 62,4 MWth
Débit vapeur : 86 t/h

Valorisation électrique
Puissance électrique : 21,5 MWe
Production annuelle attendue : 168 000 MWh par an
(équivalent de la consommation de 30 000 foyers)
Efficacité énergétique : 29% (hors cogénération)

Emplois Directs estimés : 20 en phase d’exploitation
(Chiffre à rapprocher des 180 emplois directs de Gardanne comprenant Charbon + Bois)
Emplois Indirects estimés : > 150 dans la filière sylvicole

Extraits d’articles de Presse

Daniel Kretinsky signe le rachat de deux centrales à charbon

Source Le Monde 05 juillet 2019

Groupe tchèque EPH rachat au groupe allemand Uniper

Dix-huit mois avant leur fermeture, le groupe tchèque EPH a officialisé jeudi le rachat de deux des dernières centrales à charbon françaises au groupe allemand Uniper.
UNIPER est un groupe allemand passé sous la holding EPH Tchèque du milliardaire Daniel Kretinsky.

C’est un calendrier pour le moins étonnant : quelques jours après que l’Assemblée nationale a voté le dispositif de fermeture des dernières centrales à charbon françaises, le groupe tchèque EPH a annoncé, jeudi 4 juillet, qu’il signait le rachat des centrales de Saint-Avold (Moselle) et Gardanne (Bouches-du-Rhône). Le milliardaire Daniel Kretinsky (actionnaire indirect et minoritaire du Monde)avait engagé, en décembre 2018, des négociations exclusives avec le groupe allemand Uniper, qui souhaitait se désengager du marché français.

Le groupe EPH possède des centrales électriques, des gazoducs et des distributeurs d’électricité et de gaz dans plusieurs pays européens, notamment en Slovaquie et en République tchèque, mais aussi en Italie, en Allemagne et au Royaume-Uni.

Des sites rachetés à « un prix très bas »

C’est une vente d’un type assez rare : le groupe EPH rachète deux sites qui doivent fermer au 1er janvier 2022, selon les modalités définies dans la loi en discussion au Parlement. Ce qui laisserait à l’industriel tchèque au mieux dix-huit mois d’opérations avant de devoir fermer et gérer l’indemnisation et le reclassement des salariés concernés.

C’est d’ailleurs cet engagement d’Emmanuel Macron qui avait décidé Uniper à vendre ces sites. « La décision du gouvernement français de fermer ces deux centrales à charbon, bien avant la fin de leur vie opérationnelle, aurait affecté l’ensemble de nos activités », a ainsi précisé jeudi Eckhardt Rümmler, chef d’exploitation d’Uniper, dans un communiqué.

Ce rachat est d’autant plus surprenant que la centrale de Gardanne, dont les salariés sont en grève depuis plusieurs mois, est totalement à l’arrêt.

Alors pourquoi racheter des centrales dans cette situation ? Si EPH ne communique pas sur le prix du rachat, une source proche des négociations évoque un « prix très bas », compte tenu de la volonté d’Uniper de ne pas gérer la fermeture. D’autant que le rachat comporte aussi une centrale à gaz, qu’EPH s’est déjà engagé à revendre à Total pour une somme non communiquée. Selon plusieurs sources, la revente des tranches gaz à Total couvrirait le rachat des centrales à charbon.

Vient ensuite la question de l’indemnisation : le cadre fixé par la loi en discussion n’autorise les opérateurs de centrales à charbon à n’opérer que quelques heures par an, rendant l’exploitation déficitaire. L’objectif du ministère et des députés avec cette mesure est d’éviter que les exploitants sollicitent une indemnisation en contrepartie de la fermeture imposée par l’Etat puisque les opérateurs (EPH et EDF pour deux autres centrales) fermeraient par eux-mêmes.

Continuer à produire de l’énergie

« Je ne pense pas qu’on va aller au clash », assure pourtant une source proche de Daniel Kretinsky. EPH peut espérer un soutien fort de l’Etat et des collectivités locales pour gérer le futur des salariés des deux sites. Daniel Kretinsky a, par ailleurs, pris l’engagement que les fonds dégagés par cette vente seront consacrés au redéveloppement de ces sites dans le secteur énergétique. Autrement dit : les sites de ces centrales à charbon ont vocation à continuer à produire de l’énergie. Mais ce chantier est à un stade très peu avancé : le groupe de Daniel Kretinsky s’intéresse notamment à la biomasse – mais le gouvernement français est très réticent sur l’usage de bois pour produire de l’électricité.

La centrale de Gardanne possède déjà une tranche de production d’électricité à partir de biomasse, mais elle est en mauvais état et fonctionne un nombre d’heures réduit dans l’année, avec une grande partie de biomasse importée.

« C’est une manière pour nous de mettre un pied dans le secteur de l’énergie en France », estime un proche de Daniel Kretinsky. Le groupe EPH s’installe ainsi dans un domaine très largement dominé par EDF – qui produit plus de 85 % de l’électricité du pays. « La discussion avec les pouvoirs publics se passe très bien », insiste l’entourage de Daniel Kretinsky. Une manière de prouver qu’EPH a l’intention de se comporter en bon élève, pour espérer remporter d’autres positions dans l’Hexagone.

« Une logique de chasseur de primes »

Une attitude qui inquiète les organisations environnementales, qui reprochent au milliardaire tchèque d’avoir fait sa fortune en redonnant vie à des centrales à charbon et donc de contribuer fortement au réchauffement climatique. « C’est une transaction à haut risque pour la sortie du charbon en France », dénonce Cécile Marchand de l’ONG Les Amis de la Terre, qui souligne que la disposition législative sur la fermeture des centrales à charbon est « très floue » et « laisse à EPH toute marge de manœuvre pour prolonger la durée de vie des centrales ».

« Et nous sommes d’autant plus inquiets sur la transition pour les salariés : si Uniper a revendu ces actifs, c’est pour se débarrasser d’un conflit qu’il n’a pas envie de gérer et le vend à un groupe qui peut se permettre de mal fermer les sites », estime Mme Marchand.

« Disons qu’Uniper a pour habitude de faire des plans sociaux qui coûtent cher et sont très généreux. EPH fera son beurre sur cette différence et sur sa capacité à ne pas laisser les collectivités locales insensibles. C’est une logique de chasseur de primes », analyse un ancien d’Uniper.

Fermeture de la centrale à charbon de Gardanne en 2022

Source France 3 Provence Alpe Côte d’Azur « extraits » (14/03/2019)

Le gouvernement confirme la fermeture de la centrale en 2022. C’était une promesse de campagne d’Emmanuel Macron, dans le cadre d’une volonté de réduire les émissions de gaz à effet de serre.

Pourquoi fermer les centrales à charbon ?

Selon le ministère de la transition écologique, les quatre centrales à charbon émettraient en CO2 chaque année et à elles-seules, l’équivalent de 4 millions de voitures et représentent 35% des émissions de gaz à effet de serre du secteur de la production électrique.
Le gouvernement souhaite montrer l’exemple, atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050 et réduire de 40 % les émissions de gaz à effet de serres d’ici 2030.

Qu’est-ce que le projet de loi PPE ?

La programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) est un document stratégique qui détermine les grandes orientations de la politique énergétique de la France. Il doit être soumis au vote des deux assemblées.
La fermeture des centrales à charbon est inscrite dans cette programmation, mais ce n’est qu’un volet de ce plan. Le PPE fixe la réduction des émissions de gaz à effet de serre pour la production d’énergie de 30% en 2028 par rapport à 2016, le doublement de la production d’électricité renouvelable dans 10 ans, ou encore la rénovation énergétique de 2,5 millions de logements.

L’indépendance énergétique

C’est un des arguments des défenseurs des centrales à charbon. Facilité et rapidité de mise en œuvre, les centrales à charbon peuvent répondre aux besoins énergétiques dans des délais très courts.
En période hivernale, elles fournissent jusqu’à 17% des besoins électriques, contre moins de 2% le reste de l’année.

La centrale thermique de Gardanne emploie 174 salariés, mais 700 emplois indirects sont aussi menacés en cas de fermeture du site.

Quelle reconversion est possible ?

Remplacer le charbon par le bois, considéré comme durable ? EDF possède deux centrales à charbon, à Cordenais et au Havre. Elle planche actuellement sur un projet baptisé « Ecocombust », un projet visant à remplacer progressivement le charbon par des granulés à base de déchets de bois.

A Gardanne, l’expérience existe déjà depuis 4 ans. Le groupe allemand Uniper, propriétaire des usines de Gardanne et de Saint-Avold, a investi 300 millions d’euros dans une unité de production d’énergie à base de petits morceaux de bois obtenus à partir de bois brut ou de résidus de coupe.

Cependant, le bilan est mitigé, l’unité n’atteint pas ses objectifs de rentabilité et surtout, la moitié de l’approvisionnement en bois est importé du Brésil ou d’Espagne, ce qui est un non-sens écologique, pour les opposants.

Le développement des centrales biomasse

Source BASTA Mag septembre 2018

Pierre Isnard-Dupuy

Un remède « pire que le mal » face au réchauffement climatique ?

La biomasse est-elle l’avenir de la production d’énergie ? A Gardanne, près de Marseille, l’une des deux chaudières à charbon de la centrale thermique a été convertie. Elle doit, à terme, engloutir 850 000 tonnes de bois par an, dont 50% issues de coupes forestières, pour produire de l’électricité. Mais entre les risques de pollutions ou celui d’une surexploitation de la forêt régionale, le projet soulève de nombreuses oppositions. Il interroge aussi la pertinence de la biomasse issue des forêts comme solution face au réchauffement climatique, alors que le gouvernement envisage, dans son budget 2019, de consacrer plus de 7 milliards d’euros aux énergies dites renouvelables : la consommation industrielle de bois dans ces centrales est-elle soutenable ?

Décidément, l’ancienne cité minière de Gardanne, posée au pied du massif de l’Étoile entre Aix-en-Provence et Marseille, cumule les dossiers sensibles en matière d’écologie. En premier lieu, les boues rouges de l’usine d’alumine Alteo, rejetées au large des Calanques. Ensuite, à quelques centaines de mètres à peine, la non-moins emblématique centrale thermique, forte émettrice de CO2 et dont les fumées chargées de particules fines inquiètent les riverains. Une nouvelle controverse est venue s’ajouter aux deux précédentes : la conversion récente à la biomasse de l’une des deux chaudières de cette centrale à charbon. Par son gigantisme, le projet pose de nombreuses questions.

En quoi consiste-t-il ? Sous le terme « biomasse », on trouve toutes les énergies développées à partir de végétaux, que ce soit des agro-carburants, la méthanisation – production de gaz à partir de déchets verts – ou, comme dans le cas de Gardanne, ce qu’on appelle du bois-énergie, la production de chaleur et/ou d’électricité à partir de la combustion du bois. Ici, le projet est à échelle industrielle : la chaudière dénommée « Provence 4 » brûlera pas moins de 850 000 tonnes de bois par an pour une puissance de 150 mégawatts. En phase de test depuis quatre ans, la centrale biomasse est restée à l’arrêt tout l’été, officiellement pour cause de « réparation » et de « révision annuelle », selon la direction. Depuis mi-septembre, l’unité est en fonctionnement normal, « à sa puissance nominale ».

La question de l’emploi au centre du débat

Selon Uniper, l’entreprise allemande qui exploite la centrale, la conversion de Provence 4 en biomasse aurait permis de conserver 180 emplois directs, et 1000 emplois indirects. La question de l’emploi est au cœur des discussions entourant la centrale. Mais l’arrêt annoncé par le gouvernement des centrales à charbon d’ici 2022 – et par conséquent de la seconde chaudière, « Provence 5 » – laisse planer une forte incertitude sur l’avenir du site et de ses salariés, en position inconfortable. Pour Nicolas Casoni, délégué CGT de la centrale de Gardanne, la décision « est un affichage politique du gouvernement, qui veut faire croire qu’il fait de l’écologie sans en faire vraiment. Mais ce sont nos emplois qui sont menacés. » Autre motif d’inquiétude : Uniper, qui exploite aussi la centrale de Saint-Avold (Moselle), s’engage dans une revue stratégique de ses activités françaises qui pourrait aboutir à leur mise en vente. Le site de Gardanne pourrait donc faire l’objet d’une recherche de repreneur.

Nicolas Casoni réclame un « moratoire sur le charbon ». « Ceux qui veulent nous enlever le pain de la bouche nous trouverons sur leur route », ajoute le syndicaliste. Comme la CGT locale, la mairie communiste s’est rangée du côté de la centrale biomasse, perçue comme une alternative au charbon, malgré les protestations liées à ses nuisances immédiates et les interrogations sur son caractère « renouvelable ».

Les particules fines émises par la combustion du bois sont la première nuisance pointée par les détracteurs de la centrale : « Le filtre à manche [procédé industriel qui sert à retenir les particules fines, ndlr] dispose des meilleures techniques disponibles pour retenir les particules issues de la combustion et les métaux lourds provenant des bois de recyclage », défend le directeur des relations institutionnelles du site, Jean-Michel Trotignon, interrogé par Bastamag a l’occasion d’une visite du site. Mais pour les riverains, la performance est insuffisante. L’installation ne permet pas la filtration des particules fines inférieures à 2,5 micromètres, les plus dangereuses pour la santé, car elles pénètrent profondément dans les bronches.

« Les poussières se disséminent aussi depuis les camions de bois avant, pendant et après les déchargements », ajoute Bernard Auric, le président de l’« Association de lutte contre toute forme de nuisances et de pollution ». La critique est écartée par la direction de la centrale : le trafic ne serait que d’une trentaine de camions par jour, et les quais de déchargement seraient fermées hermétiquement. Autre sujet de discorde : le bruit lié au fonctionnement de l’unité biomasse. Un rapport communiqué aux riverains début juillet, commandé par la Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (Dreal), indique que les seuils réglementaires de bruit sont fréquemment dépassés, en particulier la nuit. La préfecture a enjoint l’exploitant de se mettre en conformité.

850 000 tonnes de bois consommées chaque année

En plus de ces nuisances directes, la biomasse telle qu’elle est utilisée à Gardanne est-elle vraiment une énergie renouvelable ? D’abord, la combustion du bois à Provence 4 ne se fera pas sans charbon. Le combustible fossile sera utilisé jusqu’à 13% dans le processus de production. Il s’agit de charbon pauvre extrait des terrils cévenols. En ne dépassant pas le seuil réglementaire des 15% de ressources d’origine fossile, Uniper peut prétendre à un tarif préférentiel de rachat de l’électricité, équivalant à une aide de 1,5 milliards d’euros pendant les vingt années d’exploitation autorisées.

Quid, ensuite, de l’approvisionnement en bois ? La centrale dépendra à 50% d’importations, au moins pour les dix premières années. Le bois importé provient pour le moment d’Espagne… et du Brésil. L’autre moitié est fournie « localement », soit en fait dans un rayon de 250 km, par du bois de coupe forestière et du bois de recyclage. Une hérésie du point de vue des écologistes, au regard de l’imposant volume de biomasse nécessaire : la centrale engloutira chaque année 850 000 tonnes de bois livrées sous forme de plaquettes ou bien broyées sur place.

« La forêt méditerranéenne pousse très lentement. Il faut un délai d’un siècle pour l’exploiter respectueusement. Les besoins d’Uniper vont accélérer ces cycles de coupe », s’inquiète Jérôme Freydier, de l’association SOS Forêt du Sud et syndiqué à la CGT forêt. Au contraire, pour Jean-Michel Trotignon d’Uniper, la forêt est « sous-exploitée » : « Dès qu’il y a un problème, Uniper est pointé comme bouc-émissaire. A terme, notre plan d’approvisionnement proposera 50% de bois d’élagage et de recyclage et 50% de bois de coupe, soit moins de 10% de ce que la forêt méditerranéenne produit chaque année. »

Le chiffre est, cependant, très loin d’être négligeable.

Les Parcs naturels régionaux attaquent au tribunal

Selon le responsable communication de la centrale, l’unité biomasse permettra à la filière bois de se structurer, et aidera à une meilleure gestion forestière ainsi qu’à la prévention des incendies, en évitant de laisser les bois à l’abandon. Une vision partagée par la majorité des exploitants forestiers, qui profiteront des coupes, mais battue en brèche par des agents de l’Office nationale des forêts (ONF) et des écologistes. Leur crainte est que la ressource en bois finisse par être plus ou moins considérée comme une ressource. « Le développement du bois énergie à un niveau industriel pousse à la surexploitation et à l’artificialisation de la forêt », estime Nicholas Bell, d’SOS Forêt du Sud. Les forêts et leurs écosystèmes complexes risqueraient d’être remplacés par des plantations d’arbres, bien alignés en monoculture, et entretenus à coup d’intrants chimiques comme le glyphosate… « C’est comme l’agriculture qui ne veut faire que des grands champs de maïs », résume Gérard Grouazel, propriétaire forestier et sylviculteur, également membre de SOS Forêt.

La centrale de Gardanne possède la plus haute cheminée industrielle de France (297m) qui évacue les fumées et particules de la tranche charbon.

Les Parcs naturels régionaux du Luberon et du Verdon s’inquiètent de cette possible évolution. Ils se sont joints à une saisine du tribunal administratif de Marseille, aux côtés d’associations et de collectivités des Alpes-de-Haute-Provence, qui a abouti à l’annulation de l’autorisation préfectorale d’exploitation de la centrale biomasse, le 8 juin 2017. En cause : la première étude d’impact sur les forêts alentour ne concernait qu’une zone de… 3 km autour de la centrale, alors que la coupe de bois « local » concerne un rayon de 250 km, intégrant notamment le massif du Lubéron (à 70 km de la centrale), le parc du Verdon ou encore le Parc national des Cévennes. Mais le lendemain, un nouvel arrêté ré-autorisait l’exploitation, le temps d’une régularisation.

Les Parcs naturels régionaux ont été sommés par Renaud Muselier, président LR de la Région PACA, de rentrer dans le rang et de signer une convention avec la centrale, sous peine de voir leurs subventions supprimées. Le dossier fait d’ailleurs partie des renoncements de Nicolas Hulot. L’ancien ministre de la Transition écologique et solidaire avait fait appel de la décision de justice aux côtés d’Uniper. La cour administrative d’appel de Marseille devrait rendre son jugement sur le fond d’ici la fin de l’année. La décision sera déterminante quant à l’avenir de la centrale.

Risques de conflits d’usage

Pour ses détracteurs, la centrale entre aussi en concurrence d’approvisionnement avec d’autres unités de bois-énergie, notamment à Brignoles (Var) et Pierrelatte (Drôme), qui prélèvent chacune 150 000 tonnes de bois supplémentaire chaque année. Sans oublier la papeterie de Tarascon (Bouches-du-Rhône), qui en consomme plus d’un million… Des conflits d’usage sont à prévoir. « Plus un seul tronc ne resterait pour être transformé en planche, poutre, palette ou papier », estime Nicholas Bell, de SOS Forêt du Sud.

Couper des arbres dans l’unique but de les brûler serait contre-productif : « On ne valorise pas la filière bois en brûlant. On valorise les usages durables comme le bois d’œuvre ou l’isolation », explique Jérôme Freydier, de la même association. Un rapport parlementaire de 2013, mené par le député local François-Michel Lambert (à l’époque EELV, désormais LREM), parvient aux mêmes conclusions : « Couper du bois pour ne produire que du bois-énergie reviendrait à cultiver du blé pour ne produire que de la paille », peut-on y lire. « On ne se fournit que de bois qui ne pourrait pas être valorisable autrement », avance de son côté le représentant d’Uniper.

Brûler du bois : une valorisation durable ?

Partout en Europe, le « bois-énergie » est présenté comme une alternative climatique au très polluant charbon. La directive énergies renouvelable de l’Union européenne en cours de discussion prévoit que la part des énergies considérées comme renouvelables soit porté à 32% d’ici 2030, dans le mix énergétique de l’UE (contre environ 13 % actuellement). De quoi favoriser l’essor du bois-énergie parmi les autres sources de production jugées renouvelables. Or, pour des ONG et certains scientifiques, la « neutralité carbone » du bois-énergie est un leurre.

Pire, sa combustion serait plus néfaste pour le climat que celle du charbon. 190 scientifiques ont ainsi adressé une lettre à la Commission européenne en septembre 2017 pour faire part de leurs préoccupations. « La conservation des forêts naturelles et des forêts anciennes est importante pour […] l’atténuation du changement climatique. [Elles] fonctionnent comme des puits de carbone. »

Le Conseil consultatif scientifique des académies européennes a livré une analyse similaire, dans un rapport sur « la multifonctionnalité et la durabilité des forêts de l’UE », publié en avril 2017. « Une utilisation non durable des forêts (par exemple menant à un changement d’utilisation des terres ou à une conversion des forêts anciennes à une gestion intensive à plus courte rotation) réduit inévitablement le stockage du carbone dans les arbres vivants et les sols forestiers », y apprend-t-on. En clair : les plantations d’arbres, coupées régulièrement pour alimenter une centrale biomasse, stockent bien moins de CO2 qu’une véritable forêt, laissée à l’écart d’une exploitation industrielle.

Une fuite en avant vers le bois énergie

« Les branches laissées sur place font de l’humus qui reconstitue le sol », illustre le syndicaliste forestier Jérôme Freydier. « Si les forêts sont exploitées de manière plus intensive en permanence à cause de la bioénergie, elles ne parviendront jamais à régénérer le réservoir de carbone perdu », complète la FERN, une ONG de plaidoyer pour la forêt basée à Bruxelles, dans une note d’octobre 2016 intitulée « Brûler des arbres pour produire de l’énergie n’est pas une solution pour enrayer le changement climatique ». Habituellement, le carbone du sol finit par se fossiliser. Ce cycle, qui conduit à la formation du charbon et du pétrole, serait aujourd’hui menacé. Pour Nicholas Bell, le recours au bois-énergie fait partie des « fausses solutions qui sont de vraies menaces pour la planète de la même façon que les agrocarburants ».

Ces alertes n’empêchent pas l’Office national des forêts (ONF) d’exporter du bois vers une centrale danoise et EDF de préparer la conversion de ses centrales au charbon en centrales à biomasse. De Gardanne au nord de l’Europe, la fuite en avant vers le bois-énergie semble enclenchée.