Les géométries

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Table des matières

Géométrie

Les égyptiens (-2000) et les babyloniens (-1700) l’appelaient « Mesure de la terre » , les grecs l’ont traduit par Géométrie, ils parlaient du « rectangle » de deux segments pour qualifier le produit de deux nombres. 
C’est la science des figures de l’espace et de la mesure de leur étendue.

Papyrus de Rhind vers -2000

Platon (-428, -348)
« Que nul n’entre ici s’il n’est géomètre »

« En outre, ils font usage de figures visibles, et sur ces figures, ils construisent des raisonnements sans avoir à l’esprit ces figures elles-mêmes, mais les figures parfaites dont celles-ci sont des images ».
La République

Géométrie euclidienne

Le nom de cette géométrie vient d’Euclide mathématicien de la Grèce antique dit Euclide d’Alexandrie (en Egypte) vers 300 avant J.C.
« Les Eléments » d’Euclide sont un traité de mathématiques et de géométrie qui regroupe 465 propositions en 13 livres (ces livres seront parmi les premiers à être imprimés, après la bible, en 1482 à Venise).
Livres I à IV : Géométrie plane (Pythagore, cercle, polygones réguliers)
Livres V à X : Proportions (Thalès, √2 )
Livres XI à XIII : Géométrie dans l’espace (Polyèdres réguliers, aires, cône, cylindre sphère)

Les concepts

Ils sont organisés de façon logique et déductive :
Définitions : notions premières de la théorie, acceptées sans justification. Postulats (demandes) : plus spécifiquement géométriques
Axiomes (notions communes) : caractère d’évidence plus fondamental.

Théorie : Système déductif
A partir des axiomes toutes les propriétés sont obtenues par déduction logique. On peut énoncer des théorèmes qui sont toujours accompagnés de leur preuve rigoureuse.

Source : traduction de Bernard Vitrac (Directeur de recherche au CNRS)

Les définitions

23 Définitions dont les principales sont présentées ci-après.

  • Un point est ce dont il n’y a aucune partie
  • Une ligne est une longueur sans largeur
  • Les limites d’une ligne sont des points
  • Une surface est ce qui a seulement longueur et largeur
  • Les limites d’une surface sont des lignes
  • Un angle obtus est celui qui est plus grand qu’un droit
  • Un angle aigu est celui qui est plus petit qu’un droit
  • Les figures rectilignes sont les figures contenues par des droites ; trilatères : celles qui sont contenues par trois droites, quadrilatères : par quatre ; multilatères : par plus de quatre.
  • Parmi les figures trilatères est un triangle équilatéral celle qui a les trois côtés égaux ; isocèlecelle qui à deux côtés égaux seulement ; scalène celle qui a les trois côtés inégaux.
  • De plus, parmi les figures trilatères est un triangle rectangle celle qui a un angle droit ;obtusangle celle qui a un angle obtus ; acutangle celle qui a les trois angles aigus.
  • Des droites parallèles sont celles qui étant dans le même plan et indéfiniment prolongées de part et d’autre, ne se rencontrent pas, ni d’un côté ni de l’autre.

Les Postulats

5 Postulats selon leur expression ancienne traduite par B. Vitrac. L’expression « moderne » des Postulats est présentée au chapitre suivant.

  1. Qu’il soit demandé de mener de tout point à tout point une ligne droite.
  2. Qu’il soit demandé de prolonger en ligne droite et en continuité une droite limitée.
  3. Qu’il soit demandé de construire un cercle de tout centre et de tout rayon.
  4. Qu’il soit demandé que tous les angles droits soient égaux entre eux.
  5. Qu’il soit demandé que si une droite rencontrant deux droites situées dans un même plan fait d’un même côté des angles intérieurs dont la somme soit moindre que deux droits, les deux droites prolongées indéfiniment se rencontrent du côté où la somme est inférieure à deux droits.

Les Axiomes

Neuf Axiomes

  1. Les choses égales à une même chose sont aussi égales entre elles.
  2. Et si, à des choses égales, des choses égales sont ajoutées, les touts sont égaux.
  3. Et si, à partir des choses égales, des choses égales sont retranchées, les restes sont égaux.
  4. Et si, à des choses inégales, des choses égales sont ajoutées, les touts sont inégaux.
  5. Et les doubles du même sont égaux entre eux.
  6. Et les moitiés du même sont égales entre elles.
  7. Et les choses qui s’ajustent les unes sur les autres sont égales entre elles.
  8. Et le tout est plus grand que la partie.
  9. Et deux droites ne contiennent pas une aire.

Postulats

Postulat 1 : deux points et une droite

Par deux points distincts, il passe une droite et une seule.

Postulat 2 : Segment et droite

Tout segment est prolongeable en une droite.

Postulat 3 : cercle

Deux points distincts étant donnés,
il passe un cercle et un seul de centre le premier point et passant par le second.

Postulat 4 : égalité des angles droits

Dans la définition de l’angle droit, il est clair que les deux angles au pied d’une perpendiculaire, tels que les angles ACD et BCD, sont égaux. 
Ce postulat dit qu’un angle au pied d’une perpendiculaire, tel que l’angle ACD, est égal à un angle au pied de toute autre perpendiculaire, tel que l’angle EGH.

Postulat 5 : Parallèle à une droite

C’est le postulat le plus célèbre, il est le fondement de la géométrie euclidienne :

Etant donnée une droite D et un point P en dehors de D, il existe une unique droite D’ passant par P et ne coupant jamais D. Deux droites sont parallèles si elles sont distinctes et ne se rencontrent jamais.
Par un point extérieur à une droite, il passe une droite et une seule parallèle à la droite donnée.

Selon Euclide, traduit par B. Vitrac, le 5ème Postulat s’exprime de la façon suivante :

Euclide : « Qu’il soit demandé que si une droite rencontrant deux droites situées dans un même plan fait d’un même côté des angles intérieurs dont la somme soit moindre que deux droits, les deux droites prolongées indéfiniment se rencontrent du côté où la somme est inférieure à deux droits ».

Conséquence du 5ème Postulat

La somme des angles d’un triangle est égale à un angle plat (ou 2 angles droits).
α + β + γ = π

Extrême et moyenne raison

Euclide, dans le Livre V des « Eléments » introduit la notion de proportion. 

Attention pour les Grecs, les nombres sont essentiellement des entiers.

Les rapports que nous allons étudier n’ont pas pour eux le statut de nombres. 

Expression ancienne

« Une droite est dite coupée en extrême et moyenne raison lorsque
la droite entière est au plus grand segment comme le plus grand segment est au plus petit. » 

Lorsque a est à b ce que a + b est à a :

\frac{{a}}{{b}}=\frac{{a}+{b}\ }{{a}} soit :  \frac{AC}{CB}=\frac{AB\ }{AC}

Le rapport :

 \frac{a}{b} 

est égal au nombre d’or :

\frac{a}{b}=\frac{1+\sqrt5}{2}

Expression « Moderne »

L’égalité de 2 rapports est utilisée dans la règle de proportionnalité permettant de déterminer une quatrième proportionnelle. 

On se donne 3 nombres a,b,c, à partir de l’égalité des produits en croix on peut trouver le nombre d tel que (a,b) soit proportionnel à (c,d).

Le nombre vaut :

\frac{b\ \ast\ c\ }{a}  

Le produit des extrêmes est égal au produit des moyens également appelée produit en croix

\frac{a}{b}=\frac{c\ }{d} => ad = bc  

Résolution géométrique

Sur le segment de droite AB, on élève en B une droite BO perpendiculaire à AB et telle que la longueur du segment BO soit la moitié de celle du segment AB.  
On trace le cercle de centre O et de rayon OB. Par construction, le segment AB est alors tangent au cercle. 

On trace la droite passant par le point A et le point O, centre du cercle. Cette droite coupe le cercle aux points E et F. 

En prenant le point A comme centre et la longueur AE comme rayon, on trace un arc de cercle de façon à reporter la longueur AE sur la droite AB. On détermine ainsi un point C sur la droite AB. 

Il reste à montrer que le point C est bien celui pour lequel :

\frac{AB}{AC}=\frac{AC}{CB}

Par construction, la droite AB est tangente au cercle au point B. 
En effet, la droite AB et le rayon OB sont perpendiculaires et, toute droite perpendiculaire à l’extrémité du rayon d’un cercle est tangente à ce cercle. 

La droite AF est une sécante du cercle. Or, lorsque d’un point hors d’un cercle on trace une tangente et une sécante à ce cercle, la tangente est moyenne proportionnelle entre la sécante entière et sa partie extérieure
La partie extérieure au cercle de la sécante AF est le segment AE. On peut donc écrire : 

\frac{AE}{AB}=\frac{AB}{AF}  (1)

Cependant, AE = AC + CB et AF = AE + EF. De plus, puisque le rayon du cercle est la moitié de la longueur du segment AB, le diamètre est de même longueur que le segment AB, d’où EF = AB. On peut donc écrire : AF =AE+EF =AC+AB

Par substitution en (1), on obtient :

\frac{AC}{AC+CB}=\frac{AB}{AC+AB}

En effectuant le produit des extrêmes et le produit des moyens de cette proportion, on a :
AC (AC + AB) = AB (AC + CB) et en distribuant AC2 + (AC×AB) = (AB×AC) + (AB×CB)

En soustrayant la quantité AB × AC aux deux membres de l’égalité, on trouve : 

AC2 =AB×CB,   ou,    \frac{AC}{CB}=\frac{AB}{AC}  

On obtient donc le rapport cherché et le point C obtenu par la construction est bien le point qui divise le segment AB en extrême et moyenne raison. 
En d’autres mots, AC est moyenne proportionnelle entre le segment entier AB et son plus petit segment CB.

Résolution algébrique

On pose :

\frac{a}{b}=x  

l’équation

\frac{a}{b}=\frac{a+b\ }{a}

s’écrit :

x=1+\frac{1}{x} 

En multipliant par x :

x^2=x+1,   donc :  x^2-x-1=0 

Le nombre d’or

Le « format » d’un rectangle est le rapport longueur sur largeur.

Le rectangle d’or est un rectangle dont le format est égal au nombre d’or.

La construction du rectangle d’or est très simple : 

-On trace un triangle rectangle en A

-Les côtés de l’angle droit mesurent 1 pour (AB) et ½ pour (AC). 

-On reporte la longueur de l’hypoténuse (BC) sur la demi-droite (AC).

Le théorème de Pythagore permet de calculer la longueur de l’hypoténuse :   

Donc la longueur du segment AD est égale au nombre d’or.

Hasard ou volonté ésotérique, on retrouve le rectangle d’or sur la façade du Parthénon

On retrouve le nombre d’or dans les proportions attribuées par Léonard de Vinci à « L’homme de Vitruve ».

Ce dessin réalisé à la plume vers 1490 et annoté est issu d’un traité d’architecture antique rédigé en -15 par l’architecte romain Vitruve dédié à l’empereur romain Auguste.

Le quotient entre la mesure du côté du carré et celle du rayon du cercle est le nombre d’or.

Le rapport AB sur AC est égal au nombre d’or. 

L’école d’Athènes

« La géométrie euclidienne est la géométrie de la règle et du compas »

Dans ce groupe de personnages dits les « Empiriques », Euclide se tient penché en train de démontrer avec un compas son nouveau théorème, alors que les quatre garçons qui l’entourent se montrent intéressés ou alors enthousiastes. 

Raphaël profite de la position de cette personne pour signer dans le galon du cou son œuvre. 

Ptolémée d’Alexandrie, vêtu d’un manteau orange sombre et de dos, soutient le globe terrestre (la géographie) alors que son interlocuteur, Zoroastre soutient une sphère céleste (astronomie). Raphaël réalise son autoportrait à droite de Ptolémée et regarde fixement le spectateur.

Ecole d’Athènes (fragment) Euclide avec le compas (Raphaël 1509-1512)
Chambre de la Signature, Palais pontifical, Vatican

Géométries non euclidiennes

Avant propos

Le cinquième postulat d’Euclide tracassa les mathématiciens durant des siècles. Ils essayent de trouver ce postulat.
« Deux droites sont parallèles si elles sont distinctes et ne se rencontrent jamais »
« Par un point extérieur à une droite, il passe une droite et une seule parallèle à la droite donnée »

Le problème ne fut résolu qu’en 1829 par le mathématicien russe Nicolaï Ivanovitch Lobatchevski qui montra l’impossibilité de prouver le 5ème postulat d’Euclide. 

Il avait imaginé une nouvelle géométrie qui dénonçait le 5ème postulat. 

C’était la naissance de la géométrie non euclidienne, de l’espace courbe.

Dans son mémoire « Les Fondations de la Géométrie » Lobatchevski développe la géométrie hyperbolique, en plus des formules relatives à l’aire d’un triangle en fonction des angles, il développe des formules pour le cercle et introduit des objets nouveaux, inexistants en géométrie euclidienne comme les horocycles ou les pseudo-sphères.

Horocycle
Pseudo-sphère

En 1828 Carl Friedrich Gauss mathématicien, astronome et physicien allemand décrit la théorie des surfaces dans son ouvrage « Disquisitiones generales circa superficies curvas ». Cette publication marque les débuts d’une ère nouvelle de la géométrie différentielle. Cette discipline était née au XVIIème siècle avec la découverte par Leibniz et Newton du calcul infinitésimal qui permettait d’étudier les courbes et les surfaces avec les outils d’analyse mathématiques dérivées et intégrales. 

Gauss savait que dans un triangle sphérique la somme des 3 angles ne vaut pas 180 degrés comme dans un triangle usuel mais que cette somme surpasse 180 degrés d’une quantité qui n’est rien d’autre que l’aire du triangle. 

Gauss va imaginer l’existence d’une surface « duale » de la sphère dans laquelle la somme des angles d’un triangle est cette fois inférieure à 180 degrés et pour laquelle l’écart à 180 degrés est égal à l’aire du triangle.

C’est le plan hyperbolique imaginé à cette époque comme un être mathématique abstrait.

Cette nouvelle géométrie fut développée d’un point de vue purement théorique en 1851 par le mathématicien allemand Bernhard Riemann qui fut l’élève de Gauss. Cette géométrie non euclidienne peut être utilisée pour des espaces à plus de trois dimensions et Riemann démontra que les géométries non euclidiennes pouvaient représenter des surfaces courbes.  

Les concepts majeurs de la géométrie riemannienne sont la courbure de l’espace et les géodésiques permettant de définir le plus court chemin sur cet espace.

C’est Henri Poincaré mathématicien français qui a montré que ces trois géométries sont omniprésentes et qu’elles permettent de comprendre toutes les surfaces. C’est son théorème d’uniformisation qui permet de comprendre la géométrie de toutes les surfaces à l’aide de trois modèles seulement : euclidien, sphérique, et hyperbolique. 

Avec ce théorème, toutes les surfaces ont été “géométrisées”. 

« Une géométrie ne peut être plus vraie qu’une autre, elle peut simplement être plus commode »
Henri Poincaré

Le génie de Riemann n’aboutit pas cependant à une théorie gravitationnelle du champ.  

Cette conception prémonitoire de la géométrie courbe ne sera correctement interprétée qu’en 1915 par Albert Einstein. La modélisation de l’espace-temps est basée sur une extension de la géométrie de Riemann.

Géométrie et Algèbre

Source : Conférence Andromède de Marc Lachièze Rey (lire l’article)

La théorie de la Relativité Générale et celle de la Physique Quantique reposent sur des formalismes mathématiques différents. Elles ne manipulent pas les mêmes concepts. 

La Relativité Générale repose sur de la géométrie à 4 dimensions dans l’espace-temps : c’est la géométrie de Riemann ou de Lorentz.

La Physique Quantique repose sur de l’algèbre des espaces vectoriels : les espaces de Hilbert.

Ces deux branches des mathématiques ont des liens entre elles. 
Le premier à avoir montré le lien entre les 2 formalismes est Descartes
On parle de coordonnées cartésiennes. 
Ces coordonnées permettent de faire des calculs algébriques sur des formes géométriques. Des développements mathématiques récents ont montrés des liens forts en algèbre et géométrie.

Les trois modèles géométriques

On peut classer ces modèles en fonction du 5ème Postulat d’Euclide et de sa conséquence sur la somme des angles d’un triangle dans chacune des 3 géométries.

« Par un point (M) extérieur à une droite, il passe une droite (d1) et une seule parallèle à la droite donnée »

Géométrie d’EuclideGéométrie de RiemannGéométrie de
Lobatchevski
Surface PlaneSurface SphériqueSurface Hyperbolique
Courbure NulleCourbure PositiveCourbure Négative
Une seule parallèleAucune parallèle Une infinité de parallèles
Σ des angles = π radiansΣ des angles > π radiansΣ des angles < π radians

A la fin du XIX siècle, on dispose de trois modèles géométriques:
la géométrie d’Euclide, la géométrie sphérique et la géométrie hyperbolique.

Notions de courbure

Courbure Extrinsèque

Le cercle tangent à la courbe en un point (A ou B) est appelé Cercle de Courbure ou Cercle Osculateur.

Le rayon du cercle de courbure est appelé Rayon de Courbure ( RA ou R)

L’inverse du rayon de courbure est appelé Courbure (1/ R ou  1/ R).

Si la courbe tourne vers la gauche, le rayon de courbure donc la courbure seront positifs (Point B). Inversement, si la courbe tourne vers la droite, la courbure sera négative (Point A)

Si l’on compare la courbe ci-dessous à une route, plus le virage est serré plus l’on ressent une accélération transversale élevée et plus la courbure est élevée. En ligne droite la courbure est nulle.

Au point B le virage est plus serré qu’au point A donc la courbure est plus élevée au point B qu’au point A (1/ R > 1/ R).

La courbure d’une surface décrite dans un espace à 3 dimensions peut de la même manière être décrite en chaque point par 2 rayons de courbure.

Cette notion de courbure est dite extrinsèque, car elle ne peut être mesurée que sur une courbe ou surface décrite dans un espace de dimension supérieure.
Dans l’exemple, pour décrire la courbe 1d, il faut un plan 2d.Pour décrire une surface 2d, il faut un espace 3d. 
La courbure extrinsèque dépend de l’espace dans lequel l’objet est décrit.

Courbure intrinsèque

Le problème est de définir la notion de courbure indépendamment de l’espace dans lequel on décrit l’objet. 

Courbure de Gauss

C’est Gauss qui proposa cette description de la courbure intrinsèque d’une surface. Pour cela on utilise un bout de géodésique de longueur fixée r que l’on déplace autour d’un point pour constituer l’équivalent d’un cercle. 

Si nous traçons au compas un cercle de rayon r sur une surface plane, nous obtenons une circonférence de 2πr

La même construction sur une surface courbe donnera une circonférence inférieure si la courbure est positive, et supérieure si celle-ci est négative.

Pour comprendre visuellement à quoi cette courbure correspond, il suffit d’observer qu’elle est un facteur de la différence entre la circonférence d’un cercle (ou de l’aire d’un disque) dans un espace courbe à celle d’un cercle (ou d’un disque) de même rayon dans un espace plat.

Cette notion de courbure est Intrinsèque car elle n’a pas besoin d’un espace ambiant.

Généralisation de la notion de courbure

Dans un espace de dimension supérieure, il ne suffit pas de généraliser cette notion de courbure pour mesurer la courbure de l’espace.

La façon la plus complète de mesurer la courbure d’un espace revient à comparer des vecteurs tangents

Facile dans un espace plat car tous les vecteurs tangents se trouvent dans un espace commun, l’espace tangent.
Dans le cas d’un espace courbe, en chaque point nous avons un espace tangent différent, donc comment comparer des vecteurs existant dans des espaces différents ?

La réponse à cette question est obtenue à l’aide des notions de Connexion et plus spécifiquement celle du Transport Parallèle de Levi-Civita.

La Connexion

Une connexion est un moyen de mesurer le changement d’un vecteur (ou champ de vecteurs) le long d’une courbe (localement).
Ainsi il devient possible de déplacer un vecteur sur une surface courbe, “sans le changer”.

Pour comprendre ce type de transport, il faut se baser sur la notion de géodésique. 

Une géodésique est l’équivalent de la ligne droite dans les espaces courbes : le plus court chemin entre deux points. Il est évident que pour parler de géodésique l’espace considéré doit être munit d’une métrique. 

Une métrique permet de calculer les positions, distances et angles des vecteurs.

On peut définir une connexion particulière qui définit les vecteurs tangents d’une géodésique comme parallèles à eux-mêmes. 
Cette connexion est appelée Transport Parallèle de Levi-Civita

Représentations simplifiées du Transport Parallèle

La figure ci-dessous représente le Transport Parallèle d’un vecteur tangent pour deux métriques différentes.

Un voyageur réalise le trajet partant du point A passant par les points B et C et revient au point de départ. 
Il transporte une lance qu’il conserve pendant tout le parcours dans une direction fixe.  

En géométrie euclidienne lorsque le voyageur revient au point de départ la direction de la lance est la même que celle prise au départ.

En géométrie sphérique, la direction de la lance à l’arrivée n’est plus celle du point de départ. 

Le « transport parallèle » de Levi-Civita

Tullio Levi-Civita mathématicien italien (1873-1941) élève de Ricci Curbastro à l’université de Padoue 

La publication dans « Mathematische Annalen » en 1901 de l’article de Tullio Levi-Civita et de Ricci Curbastro « Méthodes de calcul différentiel absolu et leurs applications » devient très vite le manifeste du calcul tensoriel. Dans leur papier, ils expliquent les éléments fondamentaux de cette méthode, qu’ils appellent « un nouvel algorithme », grâce auquel ils sont capables d’exprimer plusieurs relations de la géométrie mais aussi de l’analyse et de la physique mathématique (comme les équations de l’élasticité ou de l’électromagnétisme) de façon indépendante du système de coordonnées choisi. 

Leur théorie montre son efficacité spécialement dans des espaces à n dimensions (variétés riemanniennes), ce que Levi-Civita avait déjà mis en évidence dans sa thèse.

Point d’histoire

Albert Einstein et Tullio Levi-Civita ont entretenu de mars à mai 1915 une correspondance qui montre le rôle essentiel de Levi-Civita dans la formulation correcte des équations du champ gravitationnel. A. Eistein à T. Levi-Civita : « Je n’ai jamais eu une correspondance intéressante jusqu’à ce point. Vous devriez voir avec quelle joie j’attends vos lettres. »

Voici ce que déclara Albert Einstein en 1923 se souvenant du moment où il a réalisé que le calcul tensoriel pouvait être le langage approprié pour exprimer la relativité générale :
« Cependant, j’ai eu l’idée décisive de l’analogie entre le problème mathématique de la théorie de la relativité générale et la théorie gaussienne des surfaces seulement en 1912, après mon retour à Zurich, quand je ne connaissais pas encore les travaux de Riemann, Ricci et Levi-Civita. Ces travaux ont été portés à mon attention pour la première fois par mon bon ami Marcel Grossmann » 

Point mathématique et physique : Les Tenseurs

Les tenseurs sont des objets mathématiques d’un espace à plusieurs dimensions permettant en particulier d’effectuer des changements de repère.
Les tenseurs sont utilisés en géométrie différentielle, en mécanique (tenseur des contraintes, tenseur d’inertie et en relativité).
Un tenseur est généralement une fonction des coordonnées de l’espace, défini dans un espace à n dimensions par nk composantes, où k est l’ordre du tenseur.
Dans l’espace euclidien à trois dimensions, un tenseur d’ordre zéro est un scalaire, un tenseur d’ordre un est un vecteur, un tenseur d’ordre 2 est une matrice.
En relativité restreinte et en théorie quantique des champs, toutes les équations doivent être valables même si l’on change de référentiel inertiel.  
On exprimera donc toutes les lois physiques comme des relations entre tenseurs, cela permet d’exprimer les lois de la physique de façon à ce qu’elles ne varient pas lors d’un changement d’observateur.

Représentations détaillées du Transport Parallèle

On considère une surface représentant une zone vallonnée.

On imagine un champ vectoriel sur cette surface qui représente le vent à la surface des montagnes.

On observe un vecteur particulier en détail en agrandissant une zone

On compare le déplacement du vecteur tangent selon les deux méthodes 

Sur une surface courbe, la notion de parallélisme telle qu’on la connait en géométrie euclidienne devient locale. Sur une très petite distance, nous ne voyons pas de différence, car tout « bon » espace courbe est localement plat.

En revanche, plus le déplacement parallèle est fait sur une grande distance, plus les écarts s’accumulent, et le résultat n’a plus l’air parallèle du tout.

Avec ces outils, nous allons alors pouvoir définir une notion de courbure complète en comparant les vecteurs tangents d’un point à un autre de l’espace. Mais attention, le résultat de cette mesure dépendra du chemin parcouru. 

A noter que l’angle sera différent suivant le chemin choisi.

La différence définit le tenseur de Riemann
selon les directions a et b appliquées au vecteur v. 
Il décrit la dépendance (locale) des déviations de vecteurs aux chemins parcourus.

On a vu, dans les représentations simplifiées, que l’on peut observer ce décalage sur la sphère en parcourant des courbes géodésiques (morceaux de grands cercles). 

Le tenseur de courbure de Riemann décrit complètement la courbure intrinsèque d’un espace quel que soit son nombre de dimensions.

Ce sont ces notions de courbures qui sont liées au contenu en matière et énergie de l’espace-temps dans l’équation d’Einstein de la relativité générale. Le tenseur de Ricci en est une « partie » et la courbure scalaire est elle-même une plus petite « partie ».

Courbure scalaire

Prenons un point de l’espace dont nous essayons de déterminer la courbure, et coupons des « tranches » de cet espace passant par ce point, dans toutes les directions. Dans chacune de ces tranches, nous pouvons mesurer la courbure de Gauss.

La courbure scalaire sera la moyenne de toutes ces mesures

On peut comparer les aires et les volumes par rapport à un espace plat en faisant intervenir cette notion de courbure.

Dans un espace tridimensionnel courbe, supposons que nous construisions une boule de rayon r, et que son volume vaille exactement comme dans un espace tridimensionnel plat. 

Peut-on en conclure que la courbure de cet espace est nulle ? Non, car nous pouvons imaginer un espace courbe où les « longueurs » sont dilatées dans une direction, et contractées dans les deux autres directions de sorte qu’une boule ait la forme d’un ovoïde de volume 3 également.

La courbure scalaire étant la moyenne de toutes les tranches de mesure peut donc être nulle dans un espace courbe. Il suffit pour cela que les boules soient de même volume.

Essayons de contourner ce problème.

Tenseur de Ricci

Du nom du mathématicien italien Gregorio Ricci-Curbastro (1853-1925)

Reprenons notre stratégie de « découpage » de l’espace, mais cette fois-ci, prenons seulement les « tranches » d’une même direction choisie au préalable. 

Le tenseur de Ricci nous donnera la moyenne des courbures de Gauss pour une direction donnée

Nous allons alors pouvoir comparer des aires ou des volumes « directionnels ».

Pour donner un sens à cette expression étrange, nous pouvons utiliser la méthode suivante : En mesurant non pas le volume total, mais le volume d’une section de la boule nous pouvons alors différencier deux boules de même volume si l’une est déformée (les sections n’auront pas le même volume).

Attention : même si la boule déformée ressemble à un ovoïde, c’est uniquement car nous l’avons dessinée dans un espace euclidien. Il s’agit bel et bien d’une boule mais dans un espace courbe, c’est pourquoi nous pouvons comparer les volumes ou les aires.

Est-ce suffisant pour déterminer un espace courbe ? 

Non car il existe des espaces courbes où le tenseur de Ricci est nul. 

Ce cas de figure peut être visualisé dans le cadre de la relativité générale en considérant un trou noir… euclidien ! Ce type d’espace décrirait un univers vide de matière (ce qui correspond en relativité générale à un tenseur de Ricci nul) mais contenant des ondes gravitationnelles, qui courbent l’espace. 

Ce type d’espace est appelé Ricci plat (mais il n’est pas plat, il est bien courbe !). 

Donc il nous faut une notion de courbure plus générale encore.

Tenseur de Riemann

Affinons encore plus notre « découpage » de l’espace, en prenant un outil qui ne se contentera pas de nous donner des moyennes, mais qui déterminera leur valeur exacte dans chaque « tranche » : le tenseur de courbure de Riemann. Il contient en quelque sorte la collection de toutes les courbures sectionnelles en un point.

Celui-ci va mesurer la déviation des vecteurs tangents lors d’un déplacement. 

Par exemple, prenons un disque sur lequel nous déplaçons un vecteur en le gardant toujours parallèle à lui-même, c’est-à-dire pointant toujours dans la même direction. En coupant un bout de ce disque et en le recollant pour former un cône, on observe alors que les vecteurs parallèles finissent par former un angle. 

Cet angle caractérise la présence de courbure sur le cône.

Périhélie de Mercure

Cette construction permet de visualiser schématiquement un des facteurs de l’avance du périhélie de Mercure. Il est bien connu que l’orbite d’une planète autour du soleil prend la forme d’une ellipse. Mais cette ellipse est déformée par l’aplatissement du soleil (facteur presque négligeable) et l’influence des autres planètes (de loin le facteur le plus important). Cela créé une précession de l’orbite des planètes :

Synthèse sur les notions de courbure

La courbure scalaire nous donne une moyenne générale en un point et compare le volume global ou l’aire d’une boule géodésique par rapport à un espace plat.

Le tenseur de Ricci nous donne des moyennes directionnelles et compare le volume ou l’aire de sections d’une boule géodésique par rapport à un espace plat.

Le tenseur de Riemann nous donne toutes les courbures sectionnelles et mesure la courbure en comparant les vecteurs tangents via le transport parallèle.

En dimension 1 et 2 : Les trois s’annulent dans les mêmes conditions. Si l’un est nul, les autres le sont également.

En dimension 3 et supérieure : Il existe des espaces courbes (où ces tenseurs ne sont pas nuls) mais ayant une courbure scalaire nulle. Ceci est plausible : la moyenne des courbures sectionnelles peut être nulle sans qu’elles ne le soient…
On aura alors une courbure qui déformera les boules géodésiques sans changer leur volume ou leur aire.

En dimension 4 et supérieure : Il existe des espaces courbes (tenseur de Riemann non nul) où le tenseur de Ricci est nul(et donc forcément la courbure scalaire est nulle également).
Les anglo-saxons appellent ces espaces “Ricci-flat”.

L’équation d’Einstein et la courbure

Expression de l’équation

L’équation du champ de la relativité générale, aussi appelée équation d’Einstein, décrit la relation entre la courbure de l’espace-temps et la présence de matière-énergie.

Analyse de l’équation

La partie de gauche est une expression purement géométrique décrivant l’espace-temps, et la partie de droite une expression décrivant l’état physique du système, et en particulier la quantité de masse et d’énergie.

C’est ici que se trouve le double principe au cœur de la théorie, qui est une équivalence :

  • La courbure de l’espace-temps influe sur la matière et l’énergie. C’est la source de la gravitation qui règle le mouvement des corps célestes dans l’univers (y compris s’ils sont pure énergie comme la lumière).
  • La masse et l’énergie sont la principale source de la courbure de l’espace-temps. Un univers vide de matière, d’énergie et d’ondes gravitationnelles serait en conséquence plat, comme dans le cadre formel de la relativité restreinte.

Cette équation décrit la relation entre courbure et matière-énergie de façon locale. Elle ne décrit pas “tout l’univers” mais seulement une région localisée autour d’un point.

Sa formulation à base de tenseurs garantit son indépendance vis-à-vis du référentiel choisi pour l’exprimer. Elle respecte ainsi le principe de relativité sous sa forme générale.

Tous les éléments de l’équation sont déterminés, sauf le tenseur métrique gμν qui est donc la variable principale de l’équation. La résoudre revient à identifier un tenseur métrique adapté à la situation ou l’objet étudié (masse ponctuelle, masse sphérique, trou noir, etc.). Il existe plusieurs solutions connues et probablement d’autres non identifiées. L’équation du champ gμν est équivalente à la donnée de six équations différentielles très difficiles à résoudre car non linéaires. 

Quantité Géométrique

C’est dans cette partie que réside la difficulté mathématique de résolution de l’équation. Il faut pouvoir déterminer pour un corps donné (étoile, trou noir, ..) avec des propriétés données (électromagnétiques, taux de rotation, masse …) une géométrie de l’espace à 4 dimensions (espace-temps). 

Cette géométrie est définie dans gμν qui est le Tenseur Métrique solution de l’équation.

Le problème est que ce type d’équation de géométrie différentielle est comme évoqué « non linéaire » c’est-à-dire par exemple que la « gravité gravite ».

Rμν ​est le tenseur de Ricci
R est la courbure scalaire de l’espace-temps
gμν est le Tenseur Métrique que l’on doit chercher pour résoudre l’équation
Rμν – ½ ​R gμν  est appelé Tenseur d’Einstein

Quantité Physique

Elle représente la densité de matière-énergie. Mathématiquement cette partie est moins complexe car ne fait pas appel à la géométrie différentielle. Cependant, elle représente des quantités physiques complexes.Le Tenseur Energie-Impulsion Tμν​  représente la répartition d’énergie et de masse et forme une matrice. 

Exemples de solutions de l’équation d’Einstein

L’équation d’Einstein permet de décrire une situation, généralement un objet puis en déduire toutes les équations et outils dont on a besoin pour l’étudier ainsi que son influence sur les objets qui l’entourent. 

On peut également tirer des conséquences sur l’univers entier en approximant son contenu comme un fluide homogène : c’est l’objet de la cosmologie.

On a donc besoin d’un catalogue de métriques, chacune décrivant une situation particulière, modélisant toutes ou une partie des propriétés qui nous intéressent.

Espace Vide

Dans un espace vide de matière-énergie c’est-à-dire tel que Tμν​=0, on obtiendrait :

Rμν​ = Λ gμν ​ et R = 4 Λ.

Plusieurs possibilités de solutions :

  • Si Λ≠0 : alors même vide de matière-énergie, l’espace est courbé par l’énergie sombre.
    • Espace de Sitter. C’est un hyperboloïde à 4 dimensions
    • Espace Schwarzschild-de-Sitter (qui décrit un trou noir dans un espace de Sitter)
    • Espace Kerr-de-Sitter (cas en rotation)
  • Si Λ=0, l’espace est Ricci-flat (Ricci Plat). On a  Rμν ​= 0 et  R = 0.

Encore une fois, cela ne veut pas dire qu’il n’y a aucune courbure, le tenseur de Riemann n’est pas nécessairement nul. Dans cette catégorie, on retrouve :

  • Les espaces à courbure sectionnelle constante : la métrique de Milne et celle de Minkowski (espace-temps de la relativité restreinte, où gμν​=ημν​) décrivent des espaces hyperboliques (courbure sectionnelle négative).
    • Les espaces à courbure sectionnelle variable : métrique de Schwarzschild, de Kerr.

Métrique de Schwarzschild
Cette métrique décrit une masse (étoile sphérique ou trou noir de masse M entourée d’un espace vide. C’est un exemple classique d’espace à symétrie sphérique.
C’est la première solution exacte des équations d’Einstein, établie en 1915 par Karl Schwarzschild, et certainement l’une des plus influentes.
Elle décrit le champ gravitationnel de l’extérieur d’une masse statique, éventuellement oscillante, qui s’écroule ou s’expand de façon sphériquement symétrique.
C’est aussi cette métrique qui a permis la prédiction de la courbure de la trajectoire des rayons lumineux près du soleil ainsi que le calcul de l’avance du périhélie de Mercure.

Espace vide avec charge électromagnétique

Aussi appelées solutions d’Einstein-Maxwell, ce sont les métriques décrivant un espace vide autour d’un corps de masse M et de charge électromagnétique Q.
Les trous noirs effectuent probablement une rotation et ne sont pas électriquement chargés car l’univers semble être électriquement neutre. Ceci dit, l’intérieur d’un trou noir chargé ressemble mathématiquement à celui d’un en rotation, d’où leur utilité.
La différence la plus notable qu’apporte un trou noir chargé est qu’il contient un pont d’Einstein-Rosen (« trou de ver ») qui enverrai vers un autre point de l’univers ! Malheureusement très instable, il ne pourrait pas exister.

Espace radiant

Ce sont les solutions où le tenseur impulsion-énergie décrit une radiation gravitationnelle, électromagnétique ou toute autre forme de radiation sans masse (neutrinos par exemple).Cela inclut les cas d’espace vide, puisque ceux-ci peuvent contenir des radiations.

Espace à fluide parfait

Ce sont les solutions dans lesquelles le champ gravitationnel est issu de la masse, inertie et densité d’un fluide parfait. Un gaz parfait est un cas particulier de fluide parfait (cf Point d’Histoire et Point de Physique ci-dessous).

Ce sont généralement des modélisations d’étoiles et des modèles cosmologiques. 

Nous détaillerons au chapitre suivant l’équation de Friedmann qui entre dans ce cadre. 

Point d’Histoire

En 1811, Amadeo Avogadro, physicien italien, se rend compte que si on prend une certaine quantité de n’importe quel gaz à la température ambiante et à la pression atmosphérique, il occupe à peu près un volume de 22,4 litres.
Le volume, la pression et la température d’un gaz sont 3 grandeurs liées entre-elles chez les gaz. Si on connaît le volume et la température d’une certaine quantité de gaz, on peut en déduire la pression qui règne dans le système.
On invente alors  un gaz idéal dit gaz parfait qui a les propriétés suivantes :
-Le système doit être isolé, donc pas de transfert de matière de l’extérieur.
-Le volume des particules de gaz parfait doit être négligeable par rapport au volume occupé par le gaz (ce sont des particules minuscules entourées de beaucoup de vide, la loi des gaz parfait n’est plus valable à très haute pression).
-Les particules de gaz n’interagissent pas les unes avec les autres autrement que par des chocs aléatoires

Point de Physique
La Mole : Quantité de matière d’un système contenant 6,022 x 1023 entités élémentaires (atomes, ions, molécules, …). Ce nombre est appelé « nombre d’Avogadro »
La masse d’une mole d’atome exprimée en grammes, donne en première approximation le nombre de nucléons de cet atome (Fe: 26 protons et 30 neutrons pour l’isotope 56 qui est le plus répandu, masse atomique 55,9 g/mol).
On estime à 1024 le nombre d’étoiles dans l’Univers observable soit environ 1,7 Moles d’étoiles !!!  (1 litre d’eau contient 1024 atomes d’hydrogène).

Loi des Gaz Parfaits PV = nRT 


P : Pression                                 Pression standard  P0 = 1 atm (101300 Pa ou N/m2) 
V : Volume                                 Volume molaire    V0 = 22,4 l  (0,0224 m3)
T : Température                          Température          T0 = 273,15 K (0°C)  
n : Nombre de moles de gaz  
R : constante des gaz parfaits                                    R = 0,082 [atm . L . mol-1 . K-1]
           En unités S.I.           R = 8,31 [J . mol-1 . K-1]


Pour les réactions chimiques se produisant soit à température constante, à pression constante ou à volume constant on obtient les lois suivantes:


Loi de Boyle-Mariotte pour un processus isotherme


Température constante : T et nR sont constants : PV = nRT = Cste, P1 V1 = P2 V2

Loi de Gay Lussac pour un processus isobare


Pression constante : P et nR sont constants :

\frac{V}{T}=\frac{nR}{P} = Cste \Rightarrow \frac{V1}{T1}=\frac{V2}{T2}

Loi de Charles pour un processus isochore

Volume constant : V et nR sont constants :

\frac{P}{T}=\frac{nR}{V} = Cste \Rightarrow \frac{P1}{T1}=\frac{P2}{T2}
Berceau d’étoiles la Nébuleuse d’Orion
(nuage de gaz et de poussières)

Equation de Friedmann

Univers en évolution

Alexandre Friedmann physicien et mathématicien russe (mort à 37 ans en 1925). 

Il remarque en 1922 que les équations d’Einstein permettent la description de l’Univers dans son ensemble, sous certaines conditions. Il est avec Georges Lemaître et George Gamow à l’origine de la théorie de l’expansion de l’Univers et décrit 3 types d’évolutions de l’Univers dans le temps ainsi que de la notion de singularité initiale (Big Bang). 

Univers homogène et isotrope

Pour décrire l’Univers dans son ensemble Friedmann fait l’hypothèse que l’Univers est homogène et isotrope, c’est-à-dire identique en tout point de l’espace et dans toutes les directions. Pour décrire un tel Univers à un instant donné, il n’y a que deux choses qu’il faut préciser :

  • Sa Courbure qui est forcément la même en tout point de l’espace puisque ce dernier est supposé homogène.
  • La densité de matière/énergie qu’il contient, elle aussi identique en tout point pour la même raison.

Si on fait l’hypothèse d’un Univers homogène et isotrope, la seule chose qui puisse se passer est qu’il se dilate ou se contracte globalement.

Facteur d’échelle

On note a(t) le degré de dilatation à un instant t que l’on appelle le facteur d’échelle.

On pose t=0 le temps présent et a(0) = 1. Dans ces conditions a(t) mesure le degré de dilatation à l’instant t qui peut être positif pour décrire l’avenir ou négatif pour le passé.

Le facteur d’échelle permet notamment de caractériser la manière dont les distances évoluent dans l’Univers. 
Si deux points (par exemple deux galaxies) sont à une distance D0 aujourd’hui, alors au temps t, l’Univers sera caractérisé par un facteur d’échelle  a(t) et du fait de la dilatation des distances, elles se situeront à une distance : D(t) =a(t)D0

Equation de l’expansion de l’Univers

Pour connaitre l’évolution de l’Univers et de son contenu, il suffit de savoir comment a(t) change au cours du temps, c’est ce que permet de calculer l’équation de Friedmann.

\left(\frac{da}{dt}\right)^2-\ \frac{8\pi G\rho_0}{3}\frac{1}{a}\ -\ \Lambda a^2=\pm\frac{c^2}{{R_0}^2}

G : Constante de Gravitation (6,67.1011 Nm2kg-2 )

ρ0 : Densité actuelle de l’Univers

c : Vitesse de la lumière (3.108 ms-1)

a : Facteur d’échelle (fonction du temps)

R0 : Rayon de courbure de l’Univers à l’instant présent

  • Signe – pour un Univers sphérique
  • Signe + pour un Univers Hyperbolique
  • Pour un Univers plat R0 = 

Λ : Constante Cosmologique 

Analyse de l’équation de Friedmann

Sans la constante cosmologique :

Le terme :

\left(\frac{da}{dt}\right)^2

se comporte comme une énergie cinétique (Energie corps qui se déplace) 

Le terme  :

\frac{8\pi G\rho_0}{3}\frac{1}{a}

se comporte comme une énergie potentielle de pesanteur.

Le terme :

\frac{c^2}{{R_0}^2}

représente l’énergie Totale.

L’équation de Friedmann est identique à celle qu’exprime la conservation d’énergie d’un corps que l’on lance verticalement dans un champ de pesanteur. 

Le destin de l’Univers est analogue à celui d’un caillou lancé en l’air :

  • Soit il va passer par un maximum et se recontracter (comme un caillou qui retombe sur Terre)
  • Soit il va s’étendre pour toujours mais en ralentissant indéfiniment (comme un caillou lancé suffisamment fort pour s’échapper de l’attraction terrestre)

Avec la Constante Cosmologique  

Le terme  fait que l’on se retrouve dans le cas d’une pierre attachée à un « anti-ressort » !

Plus a(t) est élevé plus ce terme pèse négativement. 

Plus l’Univers est dilaté, plus le terme  va le pousser à se dilater encore plus.

C’est ce qui provoque l’expansion accélérée de l’Univers.

La Géométrie non commutative

Description de la théorie

Alain Connes mathématicien
Médaille Field 1982 et Médaille d’or 2004 du CNRS

Les mathématiques fonctionnent sur deux registres complémentaires, le « visuel », qui perçoit instantanément le sens d’un théorème sur une figure géométrique, et l’ « écrit », qui s’appuie sur le langage, sur l’algèbre, et s’inscrit dans le temps. Selon Hermann Weyl, « l’ange de la géométrie et le diable de l’algèbre » se partagent la scène, ce qui illustre bien les difficultés respectives des deux domaines

Les travaux d’Alain Connes s’inscrivent dans la relation entre ces deux registres.

Jusqu’à la découverte en 1925 de la mécanique quantique, la géométrie classique était basée sur la dualité́, inaugurée par Descartes et l’introduction des coordonnées cartésiennes, entre géométrie et algèbre commutative. L’algèbre commutative, celle que nous avons tous apprise à l’école, est une algèbre où le produit de deux quantités algébriques ne dépend pas de l’ordre des termes, c’est à dire que A fois B est égal à B fois A.

Avec la découverte de la mécanique quantique par Heisenberg, l’espace géométrique des états d’un système microscopique, un atome par exemple, s’est enrichi de nouvelles propriétés de ses coordonnées, comme le moment et la position, qui ne commutent plus. Alain Connes illustre son propos : « ce n’est pas la même chose d’ouvrir une canette de bière et de la boire, et d’essayer de la boire puis de l’ouvrir ». Le but de la géométrie non-commutative est de généraliser la dualité́ entre espace géométrique et algèbre au cas plus général où l’algèbre n’est plus commutative. Cela conduit à modifier deux concepts fondamentaux des mathématiques, ceux d’espace et de symétrie et à adapter l’ensemble des outils mathématiques, dont le calcul infinitésimal et la cohomologie à ces nouveaux paradigmes.

Loin d’être une simple généralisation, l’intérêt initial de la théorie provient de phénomènes entièrement nouveaux et inattendus qui n’ont pas de contrepartie dans le cas “ classique ” commutatif. Le premier de ces phénomènes est l’apparition naturelle du « temps » à partir de la non-commutativité́. Il s’agit là du résultat clé́ de la thèse d’Alain Connes, qui lui a permis de donner une classification des algèbres d’opérateurs (algèbres de Von Neumann).

La géométrie Riemannienne classique (commutative) qui provient de la découverte au qui provient de la découverte au 19e siècle de la géométrie non-euclidienne et sert de cadre à la relativité́ générale d’Einstein a été́ ainsi généralisée au cadre « quantique ». Les notions clé́ de mesure des distances et de courbure s’étendent au cadre non-commutatif mais acquièrent un sens nouveau.

En fait, le passage de la mesure des distances en géométrie Riemannienne à la mesure des distances en géométrie non-commutative est l’exact reflet de l’évolution de la définition du mètre dans le système métrique (1960). La définition originale du mètre, vers la fin du XVIIIe siècle était basée sur le “ mètre des archives ” défini comme une fraction (1/40 000 000) de la plus grande longueur directement mesurable, à savoir la circonférence terrestre. Un changement radical s’est produit en 1960 : le mètre a été́ redéfini comme un multiple de la longueur d’onde d’une raie spectrale orange de l’isotope 86 du krypton. Plus récemment, en 1983, la définition actuellement en vigueur a été́ arrêtée, elle utilise le spectre de l’atome de césium, et s’exprime en unité́ de temps en utilisant la vitesse de la lumière comme facteur de conversion pour relier temps et longueur.


Le passage de la géométrie de Riemann à la géométrie non-commutative est l’exact parallèle de l’évolution ci-dessus pour le mètre étalon. La mesure des distances utilise les algèbres d’opérateurs. On obtient ainsi une notion d’espace géométrique de nature spectrale, d’une très grande flexibilité́. La géométrie non-commutative traite à la fois d’espaces de dimension non- entière, d’espaces de dimension infinie, et surtout d’espaces de nature “ quantique ”, et enfin de l’espace-temps lui-même si l’on prend en compte non seulement la force électromagnétique (qui avait conduit Poincaré́, Einstein et Minkowski à leur modèle de l’espace-temps) mais aussi les forces faibles et fortes qui conduisent à un modèle non- commutatif de l’espace-temps.

Dans la théorie générale des espaces non-commutatifs, la notion de point est remplacée par celle “ d’état ” du système qui joue un peu le rôle de “ nuage de points ” et qui est de nature “ quantique ”. Néanmoins, la mesure des distances, grâce à sa formulation spectrale, continue à avoir un sens et se réduit à la longueur du plus court chemin entre deux points dans le cas classique. Cette nouvelle géométrie prolonge la géométrie classique de Riemann, mais chacune des notions classiques acquiert un sens nouveau. Par exemple, la courbure d’un espace, qui joue un rôle essentiel dans la formulation des équations d’Einstein de la relativité́ générale, continue à avoir un sens mais devient, pour un espace à quatre dimensions, le calcul de la surface de cet espace. En particulier, cela permet de reformuler de manière purement géométrique et très simple la théorie qui couple la gravitation d’Einstein avec le modèle standard des particules élémentaires.

Alain Connes a récemment travaillé sur la compréhension de la “ Renormalisation ”. Dans un premier temps, en collaboration avec D. Kreimer, il a relié le “ tour de passe-passe ” utilisé récemment, en collaboration avec M. Marcolli, A. Connes a trouvé́ la signification de la correspondance de Riemann-Hilbert impliquée dans ce problème de physique et cela les a conduit à identifier un groupe de symétrie qui avait été́ “ deviné ” par P. Cartier sous le nom de “ groupe de Galois Cosmique ”. Ceci établit un lien tout à fait inattendu entre la théorie de Galois, sous sa forme la plus sophistiquée, et la partie de la physique quantique qui est la mieux testée par l’expérience.

Modèle Standard des Particules et Théorie de la Gravitation

On constate que miraculeusement, tous ces aspects du Modèle standard émergent de la géométrie courbe de l’espace avec la gravitation couplée à la matière moyennement quelques hypothèses.

Pour le démontrer, Alain Connes a utilisé les outils qu’il a découverts et qui permettent de construire l’analogue non commutatif de la géométrie courbe de Riemann. En autorisant l’espace courbe de Riemann à posséder en chaque point une structure non commutative (comme dans le modèle de Connes-Lott), Alain Connes, avec son collègue Ali Chamseddine, a montré que le Modèle standard pouvait être généré de manière identique à la gravitation. Techniquement parlant, il existe une formule « d’action » universelle qui, appliquée uniquement à la partie commutative de la géométrie, donne les équations de la relativité générale (avec en sus des termes de type gravité conforme de Weyl). Mais appliquée à la géométrie riemannienne non commutative, elle donne en plus les équations du Modèle standard, y compris celles du champ de Higgs. Alain Connes et ses collègues ont exploré l’idée que dans le domaine de la gravitation quantique, et donc dans une phase très primitive de l’Univers, la totalité de l’espace-temps devait être décrit par une algèbre non commutative. Ce serait quand le cosmos observable s’est refroidi qu’une transition de phase analogue à celle faisant passer un gaz à l’état liquide que la partie de l’espace-temps décrite par une géométrie commutative serait née. Dernièrement, ils ont aussi proposé l’idée qu’en régime de gravitation quantique, l’espace-temps serait en fait une collection discrète de volumes de la taille de Planck. On trouve une description similaire à la géométrie dans le cadre de la gravitation quantique à boucles, notamment lorsqu’on l’applique à la surface des trous noirs.

La notion de temps quantique

Pour Alain Connes, au niveau de l’infiniment petit, le temps n’est pas le même que celui que nous connaissons.
Le temps est également au cœur de la relativité générale d’Einstein. Avec lui, il varie avec la vitesse, ce qui est déjà difficilement imaginable.
Avec la mécanique quantique, c’est pire. A l’échelle des particules, le temps est complètement différent du nôtre.
Il y a quarante ans, lors de sa thèse avec Jacques Dixmier, Alain Connes a fait une découverte, 
« Une trouvaille » comme il dit, qui tient en une phrase :

« L’algèbre non commutative engendre son propre temps. »

Alain Connes formule le phénomène de façon plus poétique : 

« L’aléa du quantique est le tic-tac de l’horloge. »

Il a fallu de nombreuses années et un travail considérable pour que le mathématicien passe de l’algèbre à la physique. Ce n’est qu’en retrouvant, avec ses propres systèmes d’équations, les résultats obtenus par les physiciens qui recherchent, par exemple, du boson de Higgs, qu’il a pu effectuer cette formidable traversée menant de l’abstraction pure à la réalité physique.

Pour lui, et c’est le cœur de son travail, « la variabilité du quantique est supérieure au temps ». Cela signifie que, dans le monde quantique, le temps n’est pas une donnée aussi fondamentale que dans le nôtre. Il existerait donc une propriété supérieure au temps.

Alain Connes l’avait touchée par le calcul en observant que l’algèbre non commutative engendrait son propre temps. Cela signifie bien que le temps est créé par autre chose.

Dans son ouvrage Le théâtre quantique, Alain Connes révèle l’importance, dans la genèse même de l’ouvrage et jusqu’à lui servir de sous-titre, de l’anagramme que lui a confiée le physicien Etienne Klein, grand amateur de cet exercice

« Le boson scalaire de Higgs » devient : « L’horloge des anges ici-bas ».

Modifier l’ordre des lettres, c’est-à-dire la commutativité, change donc irrémédiablement de sens de la phrase. De l’algèbre d’où jaillit le temps. Des anagrammes illustrant la non-commutativité. Une incertitude irréductible… Il faut s’y habituer. Il ne s’agit pas d’apprendre une autre langue mais de mettre un pied dans un ailleurs total.

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