Changement Climatique

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Table des matières

Le GIEC

Groupe d’Experts Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat

Création du GIEC

Le GIEC a été créé en 1988 par deux institutions des Nations Unies.

  • Organisation Météorologique Mondiale
  • Programme des Nations Unies pour l’Environnement

195 états sont membres du GIEC soit la quasi-totalité des pays du monde. Les États-membres peuvent contribuer volontairement au budget annuel du GIEC qui est d’environ 6 millions d’euros. La contribution de la France s’élève à 1 million d’euros et est alimentée par trois ministères : Transition écologique, Affaires étrangères, Recherche.

La principale mission du GIEC consiste à évaluer, à chacun de ses cycles, l’état des connaissances les plus avancées relatives au changement climatique.

Les rapports du GIEC ne doivent pas prescrire de choix de nature politique. La formule constamment rappelée à ce sujet est que le contenu des rapports doit être « policy relevant, but not policy prescriptive » (pertinentes politiquement, mais non prescriptives).

« Le GIEC ne fait pas ses propres projections, il évalue celles publiées par la communauté scientifique. » Deux communautés travaillent donc en parallèle au sein du groupe, d’une part, les climatologues qui tentent de simuler l’évolution du climat et, d’autre part, les socio-économistes qui tentent de simuler l’évolution des activités humaines.

Chaque gouvernement dispose d’un point focal national. En France, cette mission est dévolue à l’ONERC (Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique). 

L’expertise scientifique est conduite par trois groupes de travail et une équipe spéciale pour les inventaires nationaux de gaz à effet de serre (GES).

  • Le groupe de travail 1 évalue les aspects scientifiques du système climatique et de l’évolution du climat.
  • Le groupe de travail 2 s’occupe des questions concernant la vulnérabilité des systèmes socio-économiques et naturels aux changements climatiques, les conséquences négatives et positives de ces changements et les possibilités de s’y adapter.
  • Le groupe de travail 3 évalue les solutions envisageables pour limiter les émissions de gaz à effet de serre ou atténuer de toute autre manière les changements climatiques.
  • L’équipe spéciale pour les inventaires nationaux de GES développe et améliore un guide méthodologique pour le suivi des émissions de GES. L’usage d’une telle référence commune favorise les travaux de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques.
Processus de rédaction d’un rapport du GIEC

Les rapports sont « réécrits » 3 fois tout au long d’un processus qui dure 2 ans. Un rapport d’évaluation c’est 2  000 à 3 000 pages s’appuyant sur des milliers d’études et prenant compte plusieurs dizaines de milliers de commentaires.

Le site Web officiel du GIEC est le site IPCC. International Panel on Climate Change

Rapport spécial du GIEC (octobre 2018)

  • Les sujets de ce rapport :
    • L’impact d’un réchauffement global de 1,5 °C par rapport à la période préindustrielle
    • les trajectoires d’émission de gaz à effet de serre correspondantes

Le climat mondial s’est déjà réchauffé d’1 °C environ en moyenne par rapport à l’ère préindustrielle. Au rythme d’émissions actuelles, le réchauffement climatique atteindra 1,5 °C entre 2030 et 2052.
Sans rehaussement de l’ambition des pays signataires de l’Accord de Paris et sans mise en œuvre immédiate des mesures nécessaires, le réchauffement climatique global devrait atteindre 3 °C d’ici 2100.

Scénarios d’émission du GIEC

L’état de la planète en 2100 dépendra d’une part des gaz à effet de serre déjà émis, car leur durée de vie est d’environ 1 siècle, mais aussi de ceux qui seront émis à partir de maintenant.

Pour envisager le comportement possible des sociétés humaines dans le siècle, le GIEC réalise des calculs à partir de 40 scénarios regroupés en 4 grandes familles.

Ces scénarios ne peuvent pas couvrir toutes les éventualités et il n’est pas possible de définir les scénarios les plus probables, cependant ils constituent un ensemble d’hypothèse permettant de calculer les effets sur le réchauffement à l’échelle du siècle.

  • Famille A1
    • La croissance économique est très rapide.
    • la population mondiale culmine en 2050 à près de 9 milliards d’individus puis décroît.
    • la pénétration de nouvelles technologies énergétiquement efficaces est rapide,
    • le revenu par tête et le mode de vie convergent entre régions (c’est à dire que les Chinois, les Indiens, et les Occidentaux se mettent à vivre de manière très similaire).
    • les interactions sociales et culturelles augmentent de manière forte.
    • pour l’énergie, il y a 3 variantes : une utilisation intensive des énergies fossiles (variante A1FI, « FI » signifiant « fossil intensive ») ; une utilisation intensive des sources non fossiles (variante A1T) ; un appel aux diverses sources sans en privilégier une en particulier.
  • Famille A2
    • le monde évolue de manière très hétérogène.
    • la population mondiale atteint 15 milliards d’individus en 2100, sans cesser de croître
    • la croissance économique et la pénétration de nouvelles technologies énergétiquement efficaces sont très variables selon les régions.
  • Famille B1
    • la population mondiale culmine en 2050 à près de 9 milliards d’individus puis décroît après (l’évolution démographique est la même que pour les scénarios A1).
    • l’économie est dominée par les services et les technologies de l’information.
    • les nouvelles technologies énergétiquement efficaces sont massivement utilisées.
    • les problèmes économiques, sociaux et environnementaux constituent un point important des politiques publiques, mais il n’y a pas d’initiative supplémentaire par rapport à aujourd’hui en matière climatique
  • Famille B2
    • la population mondiale atteint plus de 10 milliards d’individus en 2100, sans cesser de croître
    • l’économie devient de plus en plus locale, avec les problèmes économiques, sociaux et environnementaux constituant un point important des politiques publiques, mais il n’y a pas d’initiative supplémentaire par rapport à aujourd’hui en matière climatique.
    • La dispersion entre les revenus par tête est inférieure à celle de A2, mais supérieure à celle de A1.
    • les nouvelles technologies énergétiquement efficaces se développement de manière inégale et moins rapidement que dans B1 ou A1.

Le réchauffement mondial

Réchauffement en surface pour les différents groupes de scénarios
(source : quatrième rapport du GIEC, 2007)

Pour un scénario donné (désigné par un sigle et matérialisé par une couleur), la dispersion des élévations de température prédites selon les modèles est matérialisée par la barre à droite de la couleur du scénario.

Par exemple le scénario A1B, en vert gras, engendre une élévation de température de 1,6 à 4,4°C selon les modèles (2 °C d’écart entre les extrêmes). Le scénario B2, en vert, conduit à 1,2 à 3,8 °C en plus selon les modèles, c’est à dire que pour ce scénario-là, « l’imprécision » des modèles engendre 2 °C d’écart sur la température atteinte

Méthode d’analyse des changements climatiques

Pour les experts, limiter la hausse à 1,5 °C passe par une réduction des émissions de CO2 de 45 % d’ici 2030 et la réalisation d’une « neutralité carbone » en 2050 – autrement dit, il faudra cesser de mettre dans l’atmosphère plus de CO2 qu’on ne peut en retirer.

Selon le rapport spécial du GIEC de 2018, au rythme actuel du réchauffement, le seuil de 1,5 °C sera franchi entre 2030 et 2052

Les facteurs déterminés par les experts sont liés à :

  • La Population
  • L’économie traduite par le PIB
    • Le PIB mesure la valeur de tous les biens et services produits dans un pays sur une année. Sa variation d’une année sur l’autre permet de mesurer le taux de croissance économique d’un pays.
  • L’intensité Energétique (rapport de l’énergie au PIB)
    • Intensité énergétique : quantité d’énergie qu’il faut utiliser pour produire un dollar (ou un euro) de biens ou services
  • Le contenu en CO2 de l’énergie consommée

Equation de KAYA

L’équation de Kaya permet de relier ces facteurs contribuant à l’émission de Gaz à Effet de Serre (GES). Yoichi Kaya est un économiste de l’énergie japonais.

L’équation de Kaya relie les émissions anthropiques (liées à l’homme) de dioxyde de carbone (CO2) à des paramètres démographiques : Population mondiale (POP), économiques : Produit intérieur Brut (PIB) et énergétiques (E).

Pour la suite on exprimera le terme énergie (E) de l’équation de Kaya en Tonnes Equivalent Pétrole (TEP).

La TEP est une mesure permettant facilement de comparer les énergies entre elles. L’équation s’écrit alors :

On pourra en se basant sur les informations disponibles sur le site de la Banque Mondiale de Données suivre l’évolution des chacun des facteurs en fonction du temps et en déduire une projection à 30 ans.

Analyse du contenu en CO2 de l’énergie consommée

On écrit l’équation sous la forme :

Le graphique ci-dessous indique le contenu en gaz à effet de serre (essentiellement
«le contenu en gaz carbonique ») par tonne équivalent pétrole d’énergie finale pour diverses énergies.
L’électricité est convertie sur l’équivalence énergie finale :
1 TEP = 11,6 MWh.
Les points d’interrogation signifient que l’on peut avoir une vague idée de l’ordre de grandeur, mais que les chiffres précis varient d’une analyse à l’autre.
(source Jean-marc Jancovici)

On remarque que, pour une consommation énergétique donnée, les émissions de CO2 dépendront beaucoup de la répartition des diverses sources que nous décidons d’avoir ou pouvons avoir dans le « mix » énergétique d’un pays.
L’essentiel de l’énergie que nous consommons actuellement dans le monde émet du CO2 (graphique ci-dessous), et la seule manière de faire baisser le « contenu en gaz carbonique de l’énergie » est de faire croître la part des énergies « sans carbone » (renouvelables et nucléaire) dans le mix.

Part de chaque source d’énergie
dans l’approvisionnement énergétique « primaire »
de la planète en 2012

L’énergie « primaire » est celle qui est à notre disposition dans le monde qui nous entoure (pétrole brut, charbon brut, gaz brut, bois et végétaux, noyaux d’uranium, chutes d’eau, rayons du soleil, chaleur des entrailles de la terre, etc).

L’énergie que nous utilisons au quotidien n’est pas de l’énergie primaire, mais « finale » : carburants raffinés, gaz purifié, électricité (qui n’est pas une énergie primaire, et qui est aussi « propre » que l’énergie primaire avec laquelle elle est fabriquée), etc.
L’hydrogène, si nous l’utilisons un jour, est aussi une énergie finale, et donc aussi « propre » que l’énergie primaire utilisée pour la fabriquer.
Les énergies « sans carbone » représentent environ 20% du total : bois, hydro, nucléaire, autres.

Analyse des paramètres de l’équation de Kaya

Source des informations : Banque Mondiale de Données

Population Mondiale

Projection à 30 ans (10 milliards) facteur multiplicatif : 1,3

Evolution de la population selon les continents

Comparaison Europe, Chine, Inde, Etats Unis, Afrique

On observe que la population africaine augmente rapidement rejoignant celle de l’Inde et la Chine pour les dépasser à l’horizon 2020-2030

Evolution du Produit Intérieur Brut

éveil de la Chine à partir des années 2000

Part relative du PIB Mondial des continents

Union Européenne, des Etats Unis et de la Chine

Le PIB par Personne s’accroît

Projection à 30 ans multiplication par 2,2

Intensité Energétique s’améliore.

Projection à 30 ans division par 2

Intensité en CO2

Elle doit être divisée par 4,5 pour compenser les autres facteurs

Au rythme actuel de l’Union Européenne il faut 50 ans pour diviser par 2 l’intensité énergétique. Ce taux de réduction est incompatible de la cible qui serait de diviser par 4 ou 4,5 . Le pointillé rouge indique la pente à tenir.
Remarque : Une pente supérieure a été obtenue par la France lors du déploiement des centrales nucléaires

Synthèse des paramètres de l’équation de Kaya

L’objectif de limitation du réchauffement climatique à 1,5°C horizon 2050-2062 implique une division par 3 des émissions en CO2.

Compte tenu des facteurs multiplicatifs identifiés pour les facteurs qui sont peu modifiables :

  • Démographie (POP) : 1,3
  • Revenus par personne (PIB/POP) : 2,2
  • Intensité Energétique de l’économie (TEP/PIB) : 1/2

Le facteur sur lequel il faut agir est le contenu en CO2 de l’énergie consommée

Il faudra le réduire le contenu en CO2 de l’énergie consommée d’un facteur 4,5 ce qui représente un effort mondial conséquent pour les produits dont l’énergie est très fortement dépendante du Carbone (Pétrole, Gaz, Charbon) 

Analyses pour l’Union Européenne

Part du solaire de l’éolien et de la biomasse dans la production nationale d’électricité

Part charbon et lignite dans la production nationale d’électricité

Démographie des pays européens

Emissions des Gaz à Effet de Serre (GES) en Union Européenne (UE)

Valeurs absolues des principaux pays contributeurs

Valeurs relatives aux émissions globales de l’U.E.

Les principaux contributeurs sont les Pays-Bas, l’Allemagne et la Pologne.
L’Espagne en 2009 puis l’Italie en 2013 ont rejoint la France au rang des contributeurs modérés. Le Royaume-Uni tend vers la valeur des contributeurs modérés.

Comment agir ?

L’étude des paramètres de la fonction de Kaya permet d’identifier les actions à tenir pour contenir le changement climatique sous les 2°C à l’horizon 2050.

Le paramètre sur lequel il faut agir en priorité est la concentration en C02 de l’atmosphère qui augmente l’effet de serre naturel et provoque le réchauffement climatique. Cette concentration doit être divisée par 3 pour limiter à 1,5°C l’augmentation de température de la planète.

Les énergies fossiles riches en carbone (charbon, pétrole, gaz) participent pour environ 80% à la production mondiale d’énergie comme nous l’avons vu plus haut « Analyse du contenu en CO2 de l’énergie consommée ».

Pour diviser par 3 la production humaine de gaz à effet de serre, il faut identifier les principales sources d’émissions de GES et décrire les trajectoires de réduction pour chacune de ces sources. En France, un groupe de réflexion étudie les différents domaines concernés et propose des voies pour la transition énergétique applicables à l’échelle de l’Europe. Ce groupe dénommé « Shift Project » a identifié 9 propositions

Propositions du « Shift Project »

The Shift Project est un « think tank » (réservoir d’idées) qui œuvre en faveur d’une économie libérée de la contrainte carbone. Association loi 1901 reconnue d’intérêt général et guidée par l’exigence de la rigueur scientifique, la mission est d’éclairer et influencer le débat sur la transition énergétique, en France et en Europe. (Directeur Jean-Marc Jancovici).

L’accord de la COP 21 sur le climat (Paris Le Bourget décembre 2015) engage l’Europe à réduire autant que possible ses émissions de gaz à effet de serre (GES) d’ici 2050. Le plafond d’émission de GES visé pour 2050 correspond à une division par 4 des émissions de 1990 des pays européens.

Le travail consiste à identifier par secteurs économiques les sources de production de GES puis à étudier les possibilités de réduction des émissions afin de fournir des propositions compatibles du traité d’accord de la COP 21.

Répartition par secteurs économiques des émissions de GES en Europe

Les « 9 propositions »

Le groupe de réflexion « The Shift Projet » propose 9 axes de transformations permettant d’atteindre pour l’Europe le plafond d’émissions fixé lors de l’accord COP 21.

Analyse des principaux Secteurs Économiques

Nous allons détailler les 3 propositions permettant d’obtenir les gains en CO2 majeurs (> 10%). Ces propositions dépendent de 3 secteurs économiques différents.
Électricité : Fermeture des Centrales à charbon
Résidentiel : Rénover les logements anciens.
Transport : Généraliser la voiture à moins de 2l/100km

Electricité

Le secteur de la production d’électricité est responsable de plus du quart des émissions brutes de gaz à effet de serre de l’Union européenne.
Le « mix » énergétique de production d’électricité en Europe provient à 43% de sources fortement émettrices en GES (charbon, gaz, pétrole, autres énergies fossiles)

Parmi ces sources, celle qui contribue le plus aux émissions de CO2 du secteur électrique est de loin le charbon, suivie dans une bien moindre mesure, par le gaz.

Puissance installée des centrales à charbon en Europe

En Europe chiffres de 2012, la puissance installée des centrales à charbon est de 165 GW. L’Allemagne (28%), la Pologne (16%) et le Royaume Uni (12%) représentent plus de la moitié (56%) de la puissance européenne installée.

Réforme des règles du marché de l’électricité en Europe

En décembre 2018, l’Union Européenne a voté une décision limitant à partir de 2025 les émissions des moyens de production électrique à 550g de CO2 par kWh.
Au-delà de cette valeur les moyens de production ne recevront plus l’aide financière de l’Europe. Cette décision interdit de fait le développement des centrales à charbon.
Cependant la Pologne a obtenu une « clause d’antériorité » qui protégera les contrats signés avant le 31 décembre 2019 avec les producteurs d’énergie.
Il faudra surveiller le nombre de contrats qui seront signés afin de voir ce que fera la Pologne.

Regard sur la Chine

Source CoalSwarm
La Chine dispose d’un parc installé en centrales à charbon de 990 GW. Le pays s’était engagé à plafonner sa capacité à 1 110 GW d’ici 2020. Cependant, en 2014, le pouvoir central a transmis aux autorités locales la décision de délivrer les autorisations de construction des centrales. Cette production « cachée » s’élèverait à 259 GW soit une augmentation de 25% qui représente à elle seule plus que la totalité des centrales à charbon aux Etats-Unis.
Sur la période 2000 – 2017, la Chine représente 70% des nouvelles capacités mondiales de production au charbon.
Seul élément positif, la Chine dispose de plus en plus de centrales en service mais elles sont de moins en moins utilisées.

Eléments économiques

L’objectif est d’estimer une fourchette du coût d’investissement permettant de remplacer les 165 GW de centrales au charbon de l’UE.
Le tableau ci-dessous permet de comparer les coûts des différentes sources d’énergies.
On remarque que les Energies Renouvelables ont des durées annuelles de fonctionnement faibles (facteur de charge). Pour l’éolien en raison de la dépendance aux conditions météorologiques (régime de dépressionnaire pour obtenir du vent), pour le photovoltaïque l’alternance jour/nuit et les conditions d’ensoleillement. L’éolien offshore offre les meilleures capacités de production et de développement des implantations. Cependant au sein de l’UE seuls quelques pays disposent d’accès maritimes compatibles de cette solution : Allemagne, France, Royaume-Uni, Pays-Bas, Belgique, Danemark, Estonie. Les autres nations auront recours à l’éolien onshore (terrestre). 

Source commission européenne 2014 + The Shiftproject

A partir de ce tableau, des possibilités géographiques et des choix politiques des pays membres (exp pour l’Allemagne décision d’abandonner la filière nucléaire), il est possible de concevoir des scénarios de remplacement des 165 GW de centrales au charbon.
Les scénarios sont chiffrés avec les coûts associés et les puissances à installer qui varient en fonction de la durée de fonctionnement annuel des différents moyens de production. Les détails par pays sont disponibles sur le site The Shiftproject

Source The Shiftproject

On note qu’entre les 2 scénarios extrêmes A 100% EnR et D 100% Nucléaire la puissance à installer est un facteur 10. Les scénarios de « mix » énergétique B et C sont dans un facteur de puissance de 4,5 par rapport au scénario D avec un facteur 2 concernant le coût.

Stockage de l’énergie

Sources CEA Plan de déploiement de l’hydrogène pour la transition énergétique + analyse des solutions de stockage de l’énergie par JM Jancovici.

La loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte (LTECV) a fixé comme objectifs un taux d’énergies renouvelables (EnR) de 32% dans la consommation finale d’énergie et de 40% dans la production d’électricité en 2030 voire 60% en 2035.

En 2017, les EnR ont participé à hauteur de 18,5% à la couverture de la consommation d’électricité en France :
– hydroélectricité 10,1 %,
– énergie éolienne 5,0%,
– énergie solaire photovoltaïque 1,9%,
– bioénergies 1,5%.
La marge de progression est encore très grande et dépendra des innovations concernant le stockage.

Le mix énergétique peut être décarboné en intégrant une part plus importante d’EnR. La part produite par l’éolien ou le photovoltaïque ne fonctionnent que par intermittence ce qui nécessitera des capacités de stockage long terme du type saisonnier permettant une restitution à la demande.

En France, ce besoin de stockage saisonnier apparaitra en 2035 période à laquelle il est prévu que le mix énergétique intégrera 60% d’EnR intermittentes.

Nous allons étudier les différentes possibilités de stockage d’énergie en rappelant quelques ordres de grandeurs concernant la consommation dans les pays développés. Un français consomme environ 45 000 kWh par an soit 5Wh par heure. Pour consommer 1 kWh, il suffit de faire fonctionner un réfrigérateur pendant une journée, un sèche-linge pendant 1/4h ou rouler 1,5 km avec une voiture.

L’énergie peut être stockée sous forme mécanique, sous forme de chaleur, sous forme chimique ou au sein du noyau d’un atome fissile. Nous allons détailler ces possibilités de stockage.

Sous forme mécanique

Un objet en mouvement possède une énergie dite « cinétique ». On pourrait créer de grands volants d’inertie, mais il faudrait des objets très lourds et très rapides. Un volant d’inertie de quelques tonnes ne stocke que quelques kWh ce qui est très peu. Un camion de 10 tonnes roulant à 100 km/h possède une énergie cinétique de 1kWh.

L’énergie mécanique peut aussi être une énergie « potentielle » c’est-à-dire que l’on peut créer un mouvement à la demande. L’eau d’un barrage placée en altitude peut être descendue à la demande, la vitesse qu’elle acquière donc l’énergie cinétique permet ensuite d’entrainer un alternateur et de produire de l’électricité. 3,6 tonnes d’eau tombant de 100 m de haut fournissent 1 kWh d’énergie.

Sous forme de chaleur

L’énergie géothermique dégagée par le centre de la Terre réchauffe la croute terrestre. On pourrait envisager de stocker la chaleur obtenue l’été pour l’utiliser l’hiver ou celle du jour pour se chauffer la nuit. Pour obtenir 1kWh il faut augmenter de 10°C 86 kg d’eau

Sous forme chimique

Tout combustible est un stock d’énergie chimique. Il suffit de faire brûler le combustible pour récupérer de l’énergie sous forme de chaleur. Le bois, les biocarburants sont un stockage chimique. Pour obtenir 1 kWh il faut 10 cl de biocarburant 200 g de bois.

Stockage sous forme d’hydrogène. Il n’y en pas sous forme naturelle sur Terre bien que ce soit l’élément le plus présent dans l’Univers. Aujourd’hui seules les techniques de compression et de liquéfaction sont au point. Elles ne permettent que de faibles quantités dans un volume donné. De l’hydrogène comprimé à 200 bars (200 fois la pression atmosphérique) ne stocke que 0,4 kWh par litre soit 30 g d’hydrogène dans un réservoir qui fait 50 à 100 fois le poids de l’hydrogène contenu. La liquéfaction permet de disposer de bien plus d’énergie par volume mais il faut accepter de perdre 50% de l’énergie contenue dans l’hydrogène initial. Des solutions sont à l’étude par le CEA nous en reparlons plus bas.

Stockage dans une batterie c’est un moyen chimique permettant une restitution sous forme électrique. Avec les batteries « standard » au plomb des voitures il faut 30 kg de batterie pour stocker 1 kWh et compter 10% de l’énergie stockée pour fabriquer la batterie.

Stockage dans un noyau atomique fissile.

L’Uranium est un stock d’énergie mais il nécessite une installation lourde (une centrale nucléaire) pour extraire cette énergie. Pour stocker 1 kWh il suffit de 1/10 de milligramme d’uranium.

En attendant la production d’énergie par fusion d’atomes légers (Hydrogène) prévue au-delà de 2050 à la suite des développements du projet ITER, c’est l’énergie de fission des atomes lourds (Uranium) qui libère le plus de puissance par unité de masse.

L’hydrogène comme vecteur de décarbonation du mix énergétique

Source Rapport du CEA 2018 Plan de déploiement de l’hydrogène pour la transition énergétique.

La recherche sur la production d’hydrogène

En tant que vecteur énergétique, l’hydrogène produit par électrolyse est à long terme une solution structurante pour l’intégration des énergies renouvelables au système électrique : il est actuellement le moyen de stockage massif inter saisonnier des énergies renouvelables électriques intermittentes le plus prometteur.

Entre 40 et 60% d’EnR intermittentes, il devient nécessaire de considérer des solutions pour du stockage inter saisonnier, permettant de pallier plusieurs jours ou semaines sans vent ou sans soleil

Comme nous l’avons vu précédemment, le besoin de stockage inter saisonnier apparaît en France en 2035 en lien avec une pénétration accrue autour de 60% d’énergies renouvelables intermittentes dans le mix électrique.

Dans ce cadre, seules les solutions à « énergie chimique » sont efficaces pour des durées d’un jour à une saison. La transformation de l’électricité en un vecteur énergétique chimique gazeux est appelée « Power-to-gas » selon la terminologie anglaise (ou « P2G »).

La technologie Proton Exchange Membrane (PEM) est la plus prometteuse en termes de coût. Elle est actuellement de l’ordre de 5€/kg pour une durée d’utilisation de 4 000 à 5 000 heures par an et un coût de l’électricité de 50€/MWh. A l’horizon 2028 ce coût pourrait être ramené à 2 à 3 €/kg.

Au niveau mondial, de grands acteurs de l’énergie (Total, Air Liquide, ENGIE, Shell, …) se sont ainsi regroupés au sein de « l’Hydrogen Council » afin de promouvoir cette solution. En Asie, la Chine veut se positionner comme le leader mondial, grâce à un alignement très fort « Gouvernement – Industrie – Recherche ».

Ainsi, au-delà du potentiel d’exportation que pourra porter rapidement la filière française, des coopérations seront envisageables, notamment avec l’Allemagne sur les sujets industriels (en lien avec la chimie allemande) et de la mobilité (avec le support des équipementiers français qui ont leurs principaux marchés dans les deux pays) pour la production d’hydrogène vert.
Dans ce contexte, une première coopération va être signée entre le CEA et l’institut Max Planck qui coordonne le projet hydrogène de l’industrie allemande.

Enfin, les cimenteries pesant particulièrement dans les émissions de CO2 mondiales (5%), un sujet de réflexion autour de la cimenterie du 21ème siècle pourrait être proposé, notamment en coopération avec la Chine.

Les énergies renouvelables intermittentes ont un facteur de charge plus faible que les sources d’énergies conventionnelles. Pour compenser ce différentiel les actions à réaliser sont les suivantes:
– Augmenter la puissance installée
– Faire du surplus de production dans les périodes utilisables
– Prévoir les solutions et moyens de stockage « long terme »
– Compléter l’infrastructure de transport pour le Gaz

Programmation Pluriannuelle de l’Energie en France (PPE)

Le ministère de la Transition écologique a identifié que la question centrale du débat est « La répartition de la production d’électricité entre filières (le mix électrique) ».
En France, le mix actuel « a vocation à se transformer profondément dans les années à venir » pour atteindre trois objectifs clés :
–  Fermeture des centrales au charbon d’ici 2022
– Réduction de la part du nucléaire à 50% à l’horizon 2025
– 40% d’électricité renouvelable en 2030

La PPE s’appuiera sur des scénarios d’évolution de la consommation d’énergie. « Pour satisfaire la demande d’électricité de façon pérenne, le rythme de fermeture des réacteurs nucléaires doit être cohérent avec l’évolution de la demande »

RTE est la filiale à 100% d’EDF qui doit assurer à la seconde près l’équilibre du réseau. Tout électron consommé doit être remplacé par un électron produit.
RTE a établi en 2017 le bilan prévisionnel en s’appuyant sur cinq scénarios pour la réussite de la transition énergétique, 2018 à 2035.

Le Bilan prévisionnel 2018 a été réalisé en concertation avec l’ensemble des acteurs (producteurs, fournisseurs, distributeurs d’électricité et de gaz, ONG, organisations professionnelles, universitaires et think-tanks, institutions).
Il a été élaboré à partir de 50 000 simulations, qui définissent des scénarios robustes et exhaustifs. 
Ce document a pour vocation d’éclairer les décisions sur les choix énergétiques permettant de disposer d’une alimentation électrique sûre et durable en 2035.
RTE souligne la difficulté de sortir du nucléaire sans émissions de CO2

Horizon 2025

La fermeture d’un nombre important de réacteurs nucléaires (de l’ordre de vingt-quatre) doit être accompagnée par une forte accélération du développement des énergies renouvelables et de la construction de nouvelles centrales au gaz (plus de 11 000 MW) pour atteindre l’objectif de 50% de production nucléaire, fixé par la loi de transition énergétique.

Horizon 2035

 Des scénarios volontairement contrastés pour accompagner les décisions qui construisent le système électrique de demain.

Tous les scénarios envisagés (nommés Ohm, Ampère, Hertz, Volt et Watt) conduisent aux conditions suivantes :
– Une croissance forte des énergies renouvelables
– La fermeture de réacteurs nucléaires
– Une évolution de la consommation électrique (stable ou en baisse dans toutes les simulations)
– Le développement massif du véhicule électrique
– La croissance de l’autoconsommation électrique.
Le travail de perspective a identifié deux éléments majeurs qui permettraient d’atteindre en 2050 les 100% d’électricité renouvelable qui rejoignent les projections de l’ADEME.

Une baisse de la consommation

RTE officialise la stagnation dans un premier temps, puis la baisse de la consommation électrique des ménages.

Aujourd’hui à 480 milliards de kWh, la consommation pourrait même, selon le scénario le plus favorable au développement des énergies renouvelables descendre à 410 milliards.

L’isolement des bâtiments chauffés à l’électricité, l’efficacité énergétique dans l’industrie et le tertiaire, la diffusion d’appareils économes expliquent cette baisse.

Elle pourrait être accentuée par l’autoconsommation des ménages. RTE estime que 3,8 millions de foyers pourraient ainsi consommer en partie l’électricité produite par la maison.

Les voitures électriques non pénalisantes

Avec des prévisions comportant jusqu’à plus de 15 millions de véhicules électriques en 2035, on arrive à une part de 8% de la production électrique destinée aux transports qui peut être compensée par les baisses de consommation.

Il faudra faire attention aux heures de recharge. Pas question de faire le plein des batteries lors des pics de consommation, mais plutôt attendre la nuit.

Les capacités de stockage des voitures devraient même être mobilisées pour capter une part de la production intermittente des renouvelables.

Fonctionnement Prévisionnel « mix » à 45% EnR intermittentes

On prévoit que les surplus de production permettent de couvrir après conversion en Hydrogène et Stockage long terme les déficits.
Le graphique ci-dessous indique les prévisions pour 2050 en se basant sur une consommation électrique de 414 TWh (1 Téra Watt heure  TWh = 1 000 GWh)
Ordre de grandeur de cette prévision en puissance installée :
– 1 année = 8760 h
– 414 TWh / 8760 h = 47,3 GW disponibles en permanence

Possibilités de stockage par l’Hydrogène

L’hydrogène est un vecteur énergétique quasiment inexistant dans la nature à l’état moléculaire: il faut donc le produire avant de l’utiliser ou éventuellement le stocker. On y parvient par divers procédés : le reformage ou gazéification d’hydrocarbures, l’électrolyse de l’eau ou la dissociation thermochimique de l’eau ou de la biomasse.

De fait, la quasi-totalité́ de l’hydrogène aujourd’hui disponible provient du reformage de gaz naturel. La thermochimie est au stade du laboratoire et l’électrolyse représente moins de 1% de la capacité́ totale de production de cet hydrogène; cette dernière n’est utilisée que si l’électricité́ est soit fatale (cas des renouvelables comme l’éolien ou le photovoltaïque), soit bon marché et/ou si une pureté́ élevée de l’hydrogène produit est requise. Actuellement, le recours croissant aux sources renouvelables conduit au développement de l’électrolyse, procédé́ bien adapté à la valorisation de ces énergies nouvelles.

Le schéma ci-dessous présente les moyens de stockage des EnR durée en fonction de la puissance stockée. On note que la technique qui permet de produire de l’hydrogène par électrolyse (PEM) puis de transformer cette énergie électrique en énergie chimique sous forme de gaz (P2G) que l’on injecte dans le réseau de Gaz Naturel (GN) permet de répondre aux grandes puissances et longues durées.

Source afhypac.org

Schéma d’intégration de la filière Hydrogène par Électrolyse de l’eau à partir des sources de production d’énergie non polluantes.
Restitution de l’énergie à l’aide de piles à combustible dans les différents secteurs économiques

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